26 DÉCEMBRE
I.
S Étienne, diacre protomartyr (cf. Ac 6-7).
?
S Marin, martyr (à Antioche).
III.
S Denys, pape (259-268) : prudent, soucieux de la doctrine catholique.
S Archélaüs, évêque à Kaskharôn ; il eut deux discussions théologiques avec Manès.
IV.
S Zenon, évêque à Maïouma après la persécution ; jusqu'à sa mort, il tissait le lin pour gagner de quoi vivre et faire l’aumône ; ses trois cousins, martyrs, Eusebios, Nestabios et Zenon sont nommés au 21 septembre.
V.
S Zosime, pape (416-417).
VI.
S Tathan, abbé à Llantathan ; irlandais, neveu de s. Samson de Dol, il serait le premier Saint celtique venu au pays de Galles.
S Théodore, mansionnaire de la basilique Saint-Pierre de Rome ; il eut une vision de s. Pierre.
S Euthymios, évêque à Sardes, exilé et martyrisé à cause de l’iconoclasme ; il ne put rester à Sardes que pendant seize des quarante-quatre années de son épiscopat.
XIX.
Ste Vicenta Mara López y Vicuña, fondatrice des Filles de Marie Immaculée (pour le service domestique) ; elle avait une grande dévotion au Sacré-Cœur.
XX.
B Jaume Mases Boncompte (Lambert Carlos, 1894-1936), lasallien, martyr brûlé vif à Barcelone, béatifié en 2007.
Bses Margarita Aknaet Phila (*1900) et Lusia Khambang (*1917), des Amantes de la Croix, Akatha Phuttha (*1882), Sesilia Butsi (*1924), Bibiana Khamphai (*1925), Maria Phon (*1929), laïques, martyres thaïlandaises (1940); durant le procès de béatification, le brigadier Lu reconnut les avoir fait exécuter pour déraciner la foi ; béatifiées en 1989.
B Secondo Pollo (1908-1941), prêtre italien, aumônier militaire durant la deuxième guerre mondiale, où il fut mortellement blessé ; béatifié en 1998.
Etienne, protomartyr
1er siècle
Le latin Stephanus, calqué sur le grec Stephanos, signifie «couronné», nom véritablement prédestiné pour ce premier Martyr de l’Eglise naissante.
Alors que le latin s’est peu à peu déformé en Estienne au Moyen-Âge, pour aboutir à la forme classique Etienne, la forme grécisante Stéphane est réapparue dans les temps récents, sans parler des autres formes d’origine anglaise ou américaine.
C’est dans le livre des Actes des Apôtres que nous pouvons trouver les informations les plus justes sur saint Etienne.
Etienne fait partie des sept premiers Diacres institués par l’Eglise (Ac 6:1-6), qui furent choisis pour servir aux tables et soulager ainsi le travail des apôtres.
Il est dit ensuite qu’Etienne, rempli de grâce et de puissance, opérait de grands prodiges et signes parmi le peuple (Ac 6:8). On l’arrêta, de faux témoins intervinrent, le sanhédrin condamne Etienne à la lapidation (Ac 6:11-15 - 7). On notera la grande ressemblance entre ce martyre et la mort de Notre-Seigneur.
Tandis qu’Etienne expire en pardonnant à ses bourreaux (Ac 7:60), comme fit Jésus en croix (cf. Lc 23:34), il est dit qu’un certain Saul approuvait ce meurtre (Ac 8:1). Etienne, en mourant, pardonne pleinement à Saul qui, peu après, se convertira en effet sur le chemin de Damas (Ac 9:1-30).
De la première annonce des apôtres, Etienne est celui qui, le premier, versa son sang pour le Christ. De là vient son surnom de Protomartyr.
De là vient aussi qu’on a conservé l’habitude de célébrer la fête de saint Etienne au lendemain de Noël : après la naissance du Christ, la naissance au ciel de son premier Témoin.
Un esprit pointilleux pourrait suggérer que la fête des saints Innocents devrait précéder celle de saint Etienne, mais ces dates se sont peu à peu fixées dans le calendrier de l’Eglise, et il serait malvenu de transformer cette belle tradition.
En 415, une révélation fit retrouver les corps de saint Etienne avec ceux de Gamaliel et Nicodème, prélude à la construction d’une basilique, qui fut malheureusement détruite moins de deux siècles après par les Perses, et dont on a retrouvé quelques mosaïques dans des fouilles récentes. Décidément, la terre du Seigneur sera donc toujours la proie des guerres…
Des reliques de saint Etienne ont ensuite circulé en Occident. Beaucoup de sanctuaires furent élevés en l’honneur du Protomartyr, une trentaine rien qu’à Rome, avant les nombreuses cathédrales construites en Gaule, en particulier celle de Bourges.
Et mentionnons pour terminer que saint Etienne est nommé dans la prière Nobis quoque peccatoribus du Canon romain de la messe.
Denys, pape
258-268
Le seul pape qui portât le nom de Denys était romain et succéda à saint Sixte II comme vingt-cinquième pape.
On ne connaît rien de sa vie antérieure, mais il avait déjà une notoriété certaine sous les deux papes précédents, saint Etienne 1er et saint Sixte II.
Cette notoriété apparaît dans la correspondance d’un autre Denys, le patriarche d’Alexandrie. Ce dernier avait une grande considération pour son homonyme romain ; quand Denys fut pape, il se mêla de la diatribe qui opposait le patriarche d’Alexandrie aux partisans de Sabellius, dont les expressions mettaient le Fils de Dieu au-dessous du Père (subordinationisme). Un concile réuni à Rome aboutit à une encyclique claire et calme sur la bonne doctrine trinitaire, sans nommer (encore moins condamner) certaines expressions maladroites de Denys d’Alexandrie. Cette encyclique ne fut pas mal accueillie en Orient et les relations entre les «deux Denys» n’en souffrirent pas.
Il ressort plutôt de ces échanges que le pape n’hésite pas à arbitrer une situation difficile de l’Eglise orientale et à imposer, sans autoritarisme, la doctrine une et sainte à cette Eglise d’Alexandrie qui est, à cette époque, la plus importante en Orient.
L’empereur Gallien publia à la même époque un rescrit restituant à l’Eglise ses lieux de culte.
Saint Denys mourut le 26 décembre 268, de mort naturelle apparemment, et fut enseveli dans le cimetière de Calliste.
Son successeur fut saint Félix 1er.
Zenon de Maïouma
300-400
On a déjà amplement parlé de Zenon le 21 septembre, dans la notice concernant ses trois cousins, les martyrs Eusebios, Nestabios et Zenon.
Zenon et son frère Aiax étaient de Maïouma, le port de Gaza (Palestine) ; Aiax se retira dans un monastère avec deux de ses trois fils et fut plus tard évêque.
Consacré à Dieu dès sa jeunesse, Zenon devint lui aussi évêque, à Maïouma, du temps de l’empereur Théodose, donc entre 380 et 395.
Seule la maladie pouvait lui faire manquer un office liturgique.
De sa formation monastique, il gardait le goût du travail manuel et tissait le lin : il gagnait ainsi sa vie et de quoi faire des aumônes. Il travailla de la sorte jusqu’à la fin de sa vie, lui, le doyen de l’épisopat.
L’historien Sozomène connut Zenon quand ce prélat était presque centenaire. Les dates proposées ci-dessus restent cependant conjecturales, puisqu’on ne sait pas exactement en quelle année Zenon naquit et mourut. Mais l’année 362, proposée dans le Martyrologe comme date de sa mort, est certainement une coquille : cette année-là, comme on l’a vu le 21 septembre lors du martyre de ses trois cousins, Zenon n’était pas encore évêque.
Le Martyrologe Romain mentionne saint Zenon de Maïouma au 26 décembre.
Zozime, pape
416-417
Ce successeur de saint Innocent 1er était le quarante-et-unième pape, fils d’un Grec qui s’appelait Abraham. On peut supposer qu’il s’appelait effectivement Zozimos, «plein de vitalité».
Il fut élu le 18 mars 416 ou 417, et mourut donc en 417 ou 418.
Pour un si bref pontificat, les mesures énergiques de ce pape ne manquèrent pas, d’ailleurs différemment appréciées par la postérité.
Il établit que c’était l’archevêque d’Arles qui avait la primauté sur celui de Vienne : même dans l’Eglise, le pape doit prendre le temps de régler de petits différends sur des questions aussi humaines et terrestres que des préséances.
Zozime condamna la doctrine volontariste de Pélage et Cælestius, qui abaissait l’action de la grâce divine.
En vingt et un mois, il consacra huit évêques, dix prêtres et trois diacres.
Il s’éteignit le 13 ou même le 25 décembre, et fut enterré le 26 décembre 417 (418) dans la basilique de Saint-Laurent sur la Via Tiburtina.
Son successeur devait être saint Boniface 1er.
Euthymios de Sardes
754-831
La jeunesse d’Euthymios n’est pas bien connue.
Il étudia dans Alexandrie d’Egypte et, revenu dans sa région natale, vécut dans un monastère, où il fut successivement ordonné diacre, puis prêtre.
Vers 787, il fut appelé à être l’évêque de Sardes : il n’avait que trente-trois ans. Le site archéologique de Sardes se trouve dans l’actuelle Turquie méridionale ; c’est à cette Eglise qu’est adressée une des sept lettres de Jean (v. Ap 3:1-6).
Cette même année-là, donc, Euthymios siégea parmi les pères du deuxième concile de Nicée, où fut condamné l’iconoclasme.
Sous l’impératrice Irène (†803), Euthymios accomplit en 798 une mission auprès du calife de Bagdad, Hâroun ar-Rachîd.
Sous Nicéphore 1er, Euthymios fut accusé d’avoir fait entrer dans la vie monastique une jeune fille convoitée par l’empereur (ou un fonctionnaire de celui-ci) ; l’affaire tourna mal et l’évêque fut exilé sur l’île de Pantellaria (entre Sicile et Tunisie), de 803 à 811.
Libéré à la mort de Nicéphore, Euthymios ne put retourner dans son diocèse. Il se retira dans un monastère de Bithynie, où des envoyés impériaux tentèrent, en 814, de le gagner à l’iconoclasme. Conduit à Constantinople, Euthymios réitéra sa position en face de l’empereur Léon l’Arménien et fut alors relégué sur l’île de Thasos (Thrace, Grèce N).
En janvier 821, Euthymios fut rappelé à Constantinople ; il apparaissait alors comme le principal exposant de la doctrine orthodoxe sur le culte des saintes Images et, vers 826, fut à nouveau interné au cap Akritas (Grèce SW), pendant trois années, dans une prison obscure et infecte.
En 831, nouveau scandale politique qui relança les accusations contre Euthymios. Il fut interrogé par l’empereur en personne qui, exaspéré, frappa l’Evêque de quatre gifles, le fit dépouiller de ses vêtements et exiler sur un îlot de la mer de Marmara. Euthymios y retrouva Methodios, le futur patriarche de Constantinople.
En décembre 831, trois envoyés impériaux vinrent interroger à nouveau Euthymios, qui reçut cent-vingt coups de nerfs de bœuf. Euthymios survécut huit jours à ce traitement et mourut dans les bras de Methodios, le 26 décembre 831, âgé de soixante-dix-sept ans.
Son épiscopat avait duré quarante-quatre ans, mais il n’avait séjourné que seize ans dans son diocèse. Il se pourrait même que son successeur, Jean, eût été nommé avant 831, pour remplacer l’évêque exilé et emprisonné.
Le Martyrologe Romain mentionne saint Euthymios de Sardes au 26 décembre.
Vicenta María López y Vicuña
1847-1890
Les parents de Vicenta étaient à Cascante (Navarre, Espagne), mais la destination de leur fille fut Madrid.
Elle naquit à Cascante le 22 mars 1847, de José María López, avocat à Pampelune, et de María Nicolasa Vicuña.
En 1857, Vicenta fut confiée à ses oncle et tante madrilènes, Manuel María et María Eulalia Vicuña. Ceux-ci dirigeaient une œuvre de charité en faveur des femmes qui rejoignaient la capitale espagnole pour y trouver du travail.
Vicenta fut spirituellement guidée par les Jésuites et, au terme de son adolescence, se sentit appelée à prolonger l’œuvre de ses oncle et tante. Elle avait dix-sept ans, et son directeur spirituel lui conseilla d’attendre un peu.
Le moins qu’on puisse dire est que ses propres parents ne lui donnèrent pas facilement leur assentiment : ils demandèrent à leur fille de revenir à Cascante, mais Vicenta repartit à Madrid en 1869. C’est avec sa tante qu’elle réunira les premières femmes dans un appartement de Madrid, dès 1871.
La situation socio-politique ne favorisait pas non plus un tel projet ; Vicenta manquait de subsides, et l’on ne voyait pas d’un bon œil une femme fonder une œuvre pour des «auxiliaires de vie» ; en un mot, tout et tous contrariaient ses projets, mais sa vocation était irrésistible : s’appuyant sur l’énergie mystique du Sacré-Cœur de Jésus, et soutenue par l’archevêque de Madrid, elle fonda en 1876 la congrégation des Religieuses de Marie Immaculée, destinée à procurer la sanctification et la perfection personnelles, et la sanctification et le progrès des jeunes qui se dédient au service domestique.
Trois ans plus tard déjà, Vicenta n’avait que trente-deux ans lorsqu’elle ressentit les premiers symptômes de la tuberculose. Les séjours aux stations balnéaires de Panticosa (Huesca) et de El Molar (Madrid), ne donnèrent pas les résultats qu’on en pouvait espérer.
Malgré cela, Vicenta voyagea et prêta main forte à la fondation des maisons de Madrid, Saragosse, Jerez de la Frontera, Séville, Barcelone, Burgos.
Pour cette dernière fondation, elle suivit tous les épisodes de l’achat du terrain et de la construction, depuis sa chambre de Barcelone, où elle fit profession solennellement le 31 juillet 1890, fête de saint Ignace de Loyola.
Elle s’éteignit le 26 décembre 1890.
Béatifiée en 1950, elle fut canonisée en 1975.
Jaume Mases Boncompte
1894-1936
Jaume (Jaime, Jacques) était né à Agramunt (Lleida) le 14 avril 1894, et fut baptisé le 16.
Elève des Frères Lasalliens (des Ecoles Chrétiennes) à Agramunt, il voulut en suivre la vocation.
Novice en 1908 à Calaf, puis en 1910 à Irún, il prit le nom de Lamberto Carlos, et passa au scholasticat de Talence (Gironde, France), où le français devint sa seconde langue. Il resta à Talence comme professeur pendant deux années.
C’est en Belgique (Lembecq-lez-Hal) qu’il fit les vœux perpétuels.
Revenu en Espagne, il enseigna à Manresa, puis à Mollerusa où, en 1924, il fut nommé sous-directeur.
Il fut successivement directeur à Pons, Monistrol, et de nouveau Pons, entre 1927 et 1933, date à laquelle il prit la direction de Mollerusa ; en 1935 il fut professeur à Bonanova.
Le 19 juillet 1936, ce collège fut pris d’assaut par une multitude de miliciens, obligeant les Frères à quitter la maison ou à se faire arrêter.
Un de ceux qui purent s’échapper, fut le Frère Lamberto, qui se réfugia chez un de ses frères en ville. Après la mort du Frère Crisóstomo (v. José Llorach Bretó), il s’exposa à rencontrer les Frères dispersés dans Barcelone pour leur faire parvenir les ressources nécessaires.
Il devait souvent changer de domicile pour sa sécurité. Le 1er octobre, il alla chez une cousine, et pour calmer les soupçons, essaya de se déguiser en docker ; habillé en ouvrier, couvert de poussière, les mains pleines de graisse… il fallit partir en bateau, mais le soir du 19 décembre, il dut faire quelques achats avec sa cousine. En sortant, il rencontra un autre Frère et lui remit discrètement un peu d’argent.
Peu après, ils croisèrent deux miliciens qui les mirent les mains en l’air ; voyant le document de la UGT (le Syndicat des Ouvriers de gauche), ils les laissèrent libres, mais l’un des deux miliciens, méfiant, demanda à l’autre Frère : Dis, ce n’est pas un Frère ? - Je n’en ai aucune idée. Je sais seulement qu’il est professeur et qu’il m’a enseigné en France.
A cet instant arriva une voiture de miliciens, et on les fit monter. Arrivait aussi la cousine du Frère, et comme elle posait des questions sur lui, on l’embarqua avec. Dans la voiture, le Frère Lamberto déchira en petits morceaux un papier contenant quelques indications, et les jeta par la fenêtre ; un milicien lui adressa des reproches et des insultes, et récupéra les morceaux de papier.
Arrivés au commissariat, ils furent incarcérés. Le Frère qui l’accompagnait (et qui fut plus tard libéré) raconta que, de sa cellule, il entendait les miliciens qui hurlaient contre le Frère Lamberto : C’est un curé ! C’est un curé !
Vers onze heures du soir, on les emmena au lieu-dit Rabasada, où avaient déjà eu lieu tant d’exécutions ; les Frères se recommandèrent à Dieu, mais on les remit en prison.
Le lendemain, ils conduisirent Lamberto et sa cousine à la pharmacie dont ils avaient trouvé l’indication sur le fameux papier déchiré par le Frère et qu’ils avaient tenté de reconstituer. A force de menaces et d’insultes contre le pauvre pharmacien, ils réussirent à lui faire dire qu’il connaissait le Frère et qu’il était effectivement Religieux.
Ils reconduisirent la cousine en prison, et l’on ne sut plus rien de Lamberto, jusqu’à la fin de la guerre, lorsqu’une ancienne milicienne reconnut au tribunal l’avoir brûlé vif le 26 décembre 1936.
La date de ce martyre a parfois été portée au 16 décembre, par erreur : le dies natalis du Frère Lamberto est le 26 décembre.
Il a été béatifié en 2007.
Martyres de Thaïlande
1940
On a vu le 16 décembre comment le catéchiste Filip Siphong Onphithakt avait courageusement confessé sa foi et versé son sang pour le Christ.
Loin d’impressionner et de décourager les Chrétiens de Songkhon, le village de Filip, sa mort redonna encore plus de vigueur à six femmes qui furent à leur tour arrêtées et menacées par les soldats.
Parmi ces six femmes, il y avait deux Religieuses des Amantes de la Croix, une demoiselle et trois jeunes filles.
- Sœur Margarita Aknaet Phila, de trente-et-un ans
- Sœur Lusia Khambang, de vingt-trois ans
- Akatha Phuttha, de cinquante-neuf ans
- Sesilia Butsi, de seize ans,
- Bibiana Khamphai, de quinze ans,
- Maria Phon, de onze ans.
Le chef de la police les soupçonnait - bien à tort, de faire de l’espionnage au service de la France, durant cette guerre franco-siamoise.
Le jour de Noël, l’officier rassembla la population devant l’église. Il expliqua qu’il avait l’ordre de supprimer le Christianisme et que, pour cette raison, il leur donnait à choisir entre l’apostasie et la mort. La jeune Sesilia Butsi répondit sur place qu’elle était prête à accepter la mort, mais l’officier sembla ne pas l’avoir entendue.
La nuit suivante, Sœur Aknaet écrivit une lettre à ce chef de police, au nom de ses Compagnes. Elle la fit porter à l’officier par Sesilia.
Voici la lettre, dans une traduction de l’anglais :
Au Chef de Police de Songkhon.
Hier soir, vous avez reçu l’ordre d’effacer définitivement le Nom de Dieu, le seul Seigneur de nos vies et de nos pensées. Nous n’adorons que Lui, Monsieur. Quelques jours plus tôt, vous nous aviez fait savoir qu’il n’était pas dans vos intentions d’effacer le Nom de Dieu, et nous étions rassurées, de sorte que nous pûmes sans peur retirer notre habit religieux, qui montrait que nous étions Ses servantes. Mais ce n’est plus le cas aujourd’hui. Nous professons que la religion du Christ est la seule vraie religion. C’est pourquoi nous voudrions maintenant répondre à la question que vous nous avez posée hier soir, et à laquelle nous ne pûmes répondre, parce que nous n’y étions pas préparées. Maintenant, nous vous présentons notre réponse. Nous vous demandons d’accomplir avec nous l’ordre que vous avez reçu. S’il vous plaît, ne retardez pas davantage. S’il vous plaît, exécutez cet ordre. S’il vous plaît, ouvrez-nous la porte du ciel, de sorte que nous puissions confirmer que, en dehors de la religion du Christ, personne ne peut aller au ciel. S’il vous plaît, faites-le. Nous sommes bien prêtes. Quand nous serons parties, nous nous souviendrons de vous. S’il vous plaît, ayez pitié de nos âmes. Nous vous serons reconnaissantes et nous vous remercierons pour cela. Et au dernier jour, nous nous reverrons face à face.
N’attendez pas, Monsieur, ne remettez pas. Ô Dieu, nous respectons tes ordres, nous voulons êtres tes témoins, ô Dieu que nous aimons.
Cher Monsieur, nous avons bien pris notre décision.
On retrouve dans cette lettre les accents de celle écrite par saint Ignace d’Antioche, où il suppliait ses diocésains d’avoir pitié de lui et de le laisser aller être la proie des bêtes (v. 17 octobre).
Le 26 décembre 1940, l’officier convoqua de nouveau les Religieuses et les autres Compagnes, qui répétèrent leur ferme propos de ne pas apostasier. Les soldats emmenèrent les six femmes au cimetière et les fusillèrent.
Par bonheur, le chef du village put retrouver cette fameuse lettre (ou une copie) et la remit aux prêtres, lorsqu’ils purent revenir en Thailande, en 1943.
Plus tard, lors de l’enquête sur le martyre, le brigadier vint témoigner et confirmer qu’il avait bien donné cet ordre en haine de la religion chrétienne.
Avec le catéchiste Filip, les deux Religieuses et leurs quatre Compagnes furent béatifiées en 1989.
Akatha Phutta
1882-1940
Akatha (Agathe) était née en 1882 à Ban Kengpho (Savannakhet, Laos).
Avec ses cinquante-huit ans, elle était la plus ancienne du groupe de ces sept Martyrs. C’était une pieuse demoiselle, d’origine laotienne, qui avait embrassé le christianisme en 1918, à trente-sept ans.
Elle était la cuisinière du couvent des Religieuses.
Voir la notice : Thaïlande (Martyres de)
Margarita Aknaet Phila
1909-1940
Margarita était née en 1909 à Ban Nahi (Nong Khai, Thailande).
Entrée chez les Amantes de la Sainte Croix, elle avait pris le nom de Aknaet (Agnès).
Voir la notice : Thaïlande (Martyres de)
Lusia Khambang
1917-1940
Lusia (Lucie) était née le 22 janvier 1917 à Ban Wiang Khuk (Nong Khai, Thailande).
Elle faisait partie des Amantes de la Sainte Croix.
Voir la notice : Thaïlande (Martyres de)
Sesilia Butsi
1924-1940
Sesilia (Cecile) était née le 16 décembre 1924 dans ce village de Ban Songkon (Mukdahan, Thailande), où elle devait offrir sa vie au Christ.
C’est elle qui répondit une première fois, avec fermeté, à l’officier qui invitait la population à apostasier.
C’est elle aussi qui lui porta la lettre de Sœur Aknaet.
On le voit : elle avait seize ans.
Voir la notice : Thaïlande (Martyres de)
Bibiana Khamphai
1925-1940
Bibiana était née le 4 novembre 1925 dans ce village de Ban Songkon (Mukdahan, Thailande), où elle devait offrir sa vie au Christ.
Pieuse, elle rendait souvent visite aux Religieuses du couvent des Amantes de la Croix.
Elle versa son sang pour le Christ à quinze ans.
Voir la notice : Thaïlande (Martyres de)
Maria Phon
1929-1940
Maria était née le 6 janvier 1929 dans ce village de Ban Songkon (Mukdahan, Thailande), où elle devait offrir sa vie au Christ.
Digne de sainte Agnès (v. 21 janvier), elle préféra la mort à l’apostasie, à onze ans.
On pourrait lui appliquer le mot de saint Quodvultdeus (v. 19 février) à propos des Saints Innocents :
Ils n’ont pas encore la force de combattre en bougeant leurs bras, et ils portent déjà la palme de la victoire (Necdum mótibus membrórum valent suscípere pugnam, et victóriæ iam éfferunt palmam).
Voir la notice : Thaïlande (Martyres de)
Secondo Pollo
1908-1941
Né le 2 janvier 1908 à Caresanablot (Vercelli, Piémont, Italie NO), deuxième des cinq enfants de Carlo et Marta Ottino, de bons paysans, il reçut deux jours après au baptême les noms de Secondo et Giovanni.
Il fréquenta d’abord l’école des Frères des Ecoles Chrétiennes. Puis il entra à onze ans au Petit séminaire de Vercelli. Après la philosophie, il fut envoyé faire la théologie au Séminaire Pontifical Lombard.
En 1931, diacre, il reçut le doctorat en philosophie à l’Académie Saint-Thomas, et celui de théologie à la Grégorienne. Difficile de faire plus !
Le 15 août suivant, il fut ordonné prêtre.
On lui confia d’abord une classe au petit séminaire, en même temps que la direction spirituelle (appréciée !) des jeunes séminaristes puis, de 1936 à 1940, l’enseignement de la philosophie et de la théologie au grand séminaire de Vercelli. En outre, il était aumônier diocésain de l’Action Catholique, une mission dans laquelle le jeune prêtre montra tout l’enthousiasme de sa jeunesse, de son zèle pour la sanctification des jeunes et pour les inciter à montrer partout leur foi convaincue.
Quand la guerre éclata, il tint à suivre les garçons qu’il avait déjà guidés, et demanda à être pris comme aumônier militaire, malgré un défaut à l’œil gauche qui limitait sa vision.
Il fut donc nommé aumônier au troisième bataillon «Val Chisone» de la Division Alpine «Alpi Graie». En 1941, ce bataillon fut envoyé à Cervice (Montenegro).
C’est sur le champ de bataille que, portant secours à un blessé, il fut atteint d’une balle qui lui sectionna l’artère fémorale : c’était la mort en quelques instants.
Don Secondo Pollo mourut ce jour-là, 26 décembre 1941, versant son sang pour le Prochain qu’il aimait comme le Christ. Il avait, lui aussi, trente-trois ans.
L’Etat italien lui décerna immédiatement la médaille d’argent à la valeur militaire.
Voici le témoignage du Général Faldella, alors colonel commandant le troisième Régiment Alpin :
(Don Pollo) accomplissait son ministère avec une intime satisfaction, avec amour et esprit de service… Le but de son activité, à mon avis, était la charité, c’est-à-dire le service de Dieu et du Prochain, le bien des âmes… Don Pollo avait une personnalité qui suscitait l’admiration, et pourtant il était l’humilité personnifiée, il semblait vouloir disparaître, sans pouvoir s’éclipser. Son intelligence, sa culture, son éminente bonté, le mettaient en avant.
Et voici la citation militaire :
Aumônier d’un bataillon alpin, durant plusieurs journées de combat, malgré les mauvaises conditions physiques, il se dépensait sous le feu violent de l’ennemi, pour apporter la parole de la foi et le réconfort spirituel aux combattants des premières lignes. Avec audace et sans crainte du danger, il s’avançait là où le combat était le plus intense et, tandis qu’il accomplissait son ministère, était mortellement frappé par des balles de mitrailleuse. Sans se préoccuper pour soi-même, tout en conseillant d’aller soigner les autres blessés, il expirait avec sérénité.
L’abbé Secondo Pollo fut béatifié en 1998.