30 DÉCEMBRE
III.
S Félix I, pape (268-274) : il aurait établi l'usage de célébrer des messes auprès du corps des martyrs au jour anniversaire de leur mort.
?
S Hermes, exorciste et martyr en Mésie.
SS Mansuetus, Sévère, Appien, Donat, Honorius, avec d'autres, martyrs à Alexandrie.
IV.
Ste Anysia, martyre à Thessalonique ; elle cracha au visage d'un soldat qui voulait la forcer à sacrifier aux dieux.
S Libère, évêque à Ravenne.
S Sabin, évêque à Assise, martyr à Split avec Venustianus et sa famille, qu'il avait convertie, ainsi qu'Exupérance et Marcel, ses diacres.
V.
S Anysios, évêque à Thessalonique, vicaire du pape en Illyrie, ami de s. Jean Chrysostome.
S Perpetuus, évêque à Tours ; il remit tous ses grands biens aux pauvres, qu'il constitua ses héritiers.
VI.
S Iucundus, évêque à Aoste.
VII.
S Germer, haut fonctionnaire normand ; il eut deux filles et un fils, puis fut abbé à Saint-Samson-de-la-Roque (où on tenta de l'assassiner), puis à Flay.
VIII.
S Egwin, descendant des rois de Mercie, évêque à Worcester.
XI.
S Raniero, évêque à L'Aquila.
XII.
S Ruggiero, évêque à Canne della Battaglia.
S Lorenzo, moine en Sicile dans le rit oriental.
XIII.
B Richard, cistercien anglais à Adwerth, très érudit ; au XIVe s., l'abbé renonça à le faire canoniser à cause des frais.
Bse Margherita Colonna, clarisse près de Palestrina, sœur du cardinal Colonna ; elle soignait les Frères Mineurs infirmes et les lépreuses ; mystique.
XIX.
Bse Eugenia Ravasco, qui fonda à Gênes les Filles des Sacrés-Cœurs de Jésus et Marie, béatifiée en 2003.
XX.
B Giovanni Maria Boccardo (1848-1913), aîné de dix enfants à Turin, docteur en théologie ; il fit de sa paroisse une terre d'évangélisation et fonda la congrégation des Pauvres Filles de Saint-Gaétan, pour les malades, les orphelins et les vieillards, béatifié en 1998 ; il eut comme vicaire son propre frère, B Luigi Boccardo (cf. 9 juin).
B Daniel Ferreres Guardiola (1911-1936), laïc espagnol martyr, béatifié en 2017.
Hermes de Bononia
3e siècle
Il y a au Martyrologe plusieurs Hermes (v. 4 jan., 28 août, 22 oct., 4 nov.), et il y a dans l’antiquité plusieurs Bononia, dont l’actuelle Bologne (Italie).
Il s’agit aujourd’hui de la petite ville de Bononia (Mésie, auj. Vidin, Bulgarie).
Hermes est présenté comme un exorciste, qui fut martyrisé à Vidin, vers 300.
Ce qui est étonnant, est qu’au 4 janvier sont commémorés deux Martyrs de Mésie, et de la même époque, Hermes et Caïus ; à cela s’ajoute que Caïus était honoré à Bononia, et Hermes à Retiaria (act. Arcer), ces deux localités étant proches l’une de l’autre.
Ces rapprochements pourraient laisser supposer qu’il y ait là un doublet : il s’agirait du même Hermes, commémoré dans les deux endroits.
Le Martyrologe Romain mentionne saint Hermes de Bononia au 30 décembre.
Félix 1er pape
269-274
Ce vingt-sixième pape succédait à saint Denys.
On ne dit rien de lui.
Lors de la déposition de Paul de Samosate comme évêque d’Antioche, l’empereur proclama en 272 - et c’est important à souligner - que l’évêque légitime était celui qui était reconnu par l’évêque de Rome.
C’est peut-être ce même pape qui aurait établi que l’on célébrât la messe auprès du corps des Martyrs, au jour anniversaire de leur mort.
Saint Félix fut peut-être lui-même martyrisé, le 30 décembre 274.
Son successeur fut saint Eutychianus.
Anysios de Thessalonique
† 407
Anysios fut le disciple de s.Ascholios (? v. 23 janvier), et lui succéda comme évêque de Thessalonique en 383.
Le pape s.Damase (v. 11 déc.) l’établit son vicaire en Illyrie, titre qui lui fut confirmé par les saints papes suivants, Sirice, Anastase, Innocent (v. 26 nov., 19 déc. et 12 mars).
En décembre 391, Anysios fut chargé d’examiner avec quelques autres évêques de Grèce, la théorie de Bonosus, évêque de Sardique, qui enseignait la non-virginité de la Sainte Vierge Marie.
Lors de l’exil qui frappa s.Jean Chrysostome (v. 14 septembre), Anysios écrivit au pape Innocent 1er pour lui exprimer son soutien à l’évêque persécuté ; le pape l’en remercia par deux lettres. En 406, des évêques occidentaux qui se rendaient auprès de Jean Chrysostome, voulaient saluer au passage Anysios, mais en furent empêchés.
Anysios mourut, sans doute, à la fin de 406 ou en 407.
Le Martyrologe Romain mentionne saint Anysios de Thessalonique au 30 décembre.
Perpetuus de Tours
† 488
Perpetuus (en français actuellement : Perpet) était de grande famille sénatoriale. Il avait une sœur, Fidia Iulia Perpetua.
Nommé sixième évêque de Tours vers 458, il succédait à son parent Eustochius. Celui qui lui succédera trente ans plus tard, s.Volusianus, sera aussi un de ses parents (v. 18 janvier).
Instruit, il cultivait les Pères de l’Eglise, qu’il citait aisément.
Perpetuus fut rempli de zèle autant pour organiser la vie chrétienne dans son diocèse, que pour s’occuper des pauvres de toutes les conditions : nécessiteux, mendiants, malades, veuves, orphelins. En outre, il n’avait pas de plus grands amis que les personnages qui s’occupaient également de ces malheureux, comme par exemple le «maire» de Tours, un certain Agilon.
C’est cet Evêque qui fit construire la basilique Saint-Martin, et en fit la dédicace en 473.
Dès 475, il rédigea son testament, dont on va donner un aperçu.
A tout le clergé, il lègue la paix de notre Seigneur Jésus-Christ ; il demande l’affranchissement de tous ceux et celles qu’il a rachetés de ses deniers ; à son ami Eufrone qui est évêque d’Autun (v. 3 août), il lègue son reliquaire d’argent, ainsi que l’évangéliaire que saint Hilaire écrivit de sa propre main ; à sa sœur Fidia une petite croix d’or ; à Agilon, son cheval de parade, avec un mulet, au choix ; à son successeur, ses meubles.
Au même successeur (qui sera Volusianus, comme on l’a dit plus haut), il recommande de ne jamais rétablir dans leur rang deux prêtres déchus - il ne les nomme pas, mais précise leur village - , cependant leur fait accorder une pension.
Le Martyrologe Romain mentionne saint Perpetuus de Tours au 30 décembre.
Iucundus d’Aoste
† 505
Iucundus fut le troisième évêque d’Aoste (Piémont, Italie NW).
Son épiscopat est difficile à préciser. Une lettre du pape Gélase s’adresse à un évêque Iucundus en 496, mais on ne sait s’il s’agit de celui d’Aoste.
On sait que Iucundus participa à deux conciles à Rome, en 501 et 502. On en est donc réduit à constater que Iucundus était évêque avant 501 et qu’il mourut après 502.
Son successeur semble avoir inauguré son épiscopat vers 507.
On peut donc avancer que Iucundus mourut vers 505.
Le Martyrologe Romain mentionne saint Iucundus d’Aoste au 30 décembre.
Germer de Flay
† 660
Germer serait né à Vardes (Neuf-Marché, Seine Maritime).
Il aurait occupé de hautes charges à la cour du roi.
De son mariage naquirent deux filles, qui moururent en bas âge, et un fils, Amalbert, qui eut s.Ouen (v. 24 août) pour parrain.
Il fonda un premier monastère, qui se trouverait dans la région de l’Orne.
Vers 649, appelé par Dieu à plus de détachement, il laissa la succession à son grand fils, dit adieu à son épouse, et se retira au monastère de Pentale, qui serait aujourd’hui Saint-Samson-de-la-Roque (Eure).
Il y occupa une place importante, peut-être même fut-il supérieur, mais son enseignement était jugé trop exigeant par certains moines, qui mirent dans son lit un couteau la pointe en l’air… Germer s’en aperçut à temps et alla passer la nuit à l’église.
Le lendemain, il annonça son désir de se retirer dans la grotte de s.Samson (v. 28 juillet). Certains moines s’y opposèrent, mais s.Ouen donna raison à Germer et l’ordonna prêtre dans cette même grotte. Il y vécut plus de cinq années, avec quelques compagnons.
Passé ce temps, il demanda à s.Ouen où fonder un nouveau monastère, et ce fut ainsi l’origine de Flay. Germer y fut abbé pendant trois ans et demi.
Il mourut le 30 décembre, vers 660.
L’abbaye prit ensuite le nom de Saint-Germer-de-Fly (Oise).
Les reliques de s.Germer, transportées à Beauvais en 906, furent détruites lors de la Révolution française.
Saint Germer de Flay est commémoré le 30 décembre dans le Martyrologe Romain.
Egwin de Worcester
† 717
Ce qu’on a écrit sur Egwin a peut-être été parfois embelli, mais voici les faits.
Egwin (Ecgwin, Eegwine) descendait des rois de Mercie (Angleterre) et naquit dans le comté de Worcester.
Il reçut sa formation dans un monastère, après quoi il fut nommé conseiller du roi Ethelred.
Vers 692, tel un saint Eloi (v. 1er décembre), il fut nommé évêque de Worcester ; il en était le troisième titulaire.
Homme de principes et amant de l’ordre, il ne fut cependant pas bien reçu et ses «ennemis» en référèrent au roi et au pape, qui le convoqua.
Egwin entreprit le voyage pour Rome en esprit de pénitence. Avant d’embarquer, il s’attacha des chaînes aux jambes, qu’il ferma avec un cadenas, et jeta la clef dans la rivière. Arrivés à l’embouchure du Tibre en Italie, ses compagnons pêchèrent un poisson, qui avait absorbé la fameuse clef. Egwin se libéra alors de ses chaînes, mais le phénomène fut immédiatement connu dans tout Rome, et l’évêque accusé repartit de Rome avec des lettres d’éloge et de recommandation pour le roi Ethelred.
Egwin reprit donc sa place à Worcester. Il fonda la célèbre abbaye Notre-Dame d’Evesham ; le nouveau roi, Kenred, y participa volontiers et l’église fut consacrée vers 709.
Ensuite, le prélat fit un nouveau pèlerinage à Rome.
Sentant arriver ses vieux jours, il préféra les passer dans cette même abbaye, et céda sa place d’évêque à Wilfrith (717).
Il mourut donc à Evesham, un 30 décembre de 717 ou 720.
Saint Egwin de Worcester est commémoré le 30 décembre dans le Martyrologe Romain.
Raniero de L’Aquila
† 1077
Le diocèse de L’Aquila (Abruzzes, Italie C) ne fut érigé qu’en 1256, et succédait à celui de Forcona, qui remonterait au 7e siècle.
Raniero semble en avoir été le sixième titulaire (connu) ; on le mentionne comme évêque avant 1072, date à laquelle il mentionne lui-même sa récente installation dans le diocèse.
Six évêques seulement sur quatre siècles laisse supposer soit qu’on n’ait pas retenu tous les titulaires dans les listes - ce qui est normalement impossible - soit qu’il y ait eu de longues périodes de vacance, par exemple à cause des incessantes guerres locales, soit que ces quelques évêques aient eu une longévité assez marquée, et un temps d’épiscopat d’environ soixante années chacun.
Reste que le pape répondit plus tard à Raniero en le félicitant pour sa bonne administration et lui promettant que le Saint-Siège protégerait désormais tous ses biens.
On croit qu’il mourut en 1077 - après cinq années seulement d’épiscopat. Son successeur, Berardo, apparaît vers 1160, environ un siècle plus tard. On pourrait aussi envisager alors que Raniero soit peut-être mort plus tard.
Mais comment expliquer aussi que le seul évêque «saint» de ce diocèse soit si peu connu ? Sans doute qu’il brilla particulièrement par son humilité et sa discrétion.
Saint Raniero de L’Aquila est commémoré le 30 décembre dans le Martyrologe Romain.
Ruggiero de Canne
1060-1129
C’est un personnage à la famille et à la vie inconnues.
Son prénom a suggéré à certains qu’il pouvait être d’origine normande, sans autre preuve.
Il dut naître vers 1060 dans la petite ville italienne de Canne, qui s’appelle aujourd’hui Canne della Battaglia et se trouve maintenant enclavée dans la banlieue de Barletta (Pouilles, Italie SE).
Il devint évêque de sa ville natale.
Les fréquentes rébellions des barons normands contre Robert Guiscard engendrèrent des guerres et Canne fut rasée par Guiscard en 1083.
Il est dit de Ruggiero qu’il se préoccupa charitablement de la population, allant chercher dans la campagne, et parfois pieds nus, de la nourriture.
Les papes eurent aussi recours à ses conseils, signe de sa culture, de sa vertu.
Ruggiero mourut le 30 décembre 1129, et ce jour-là le Martyrologe mentionne saint Ruggiero.
Lorenzo Ravì de Frazzanò
1120-1162
Lorenzo naquit le 22 octobre 1120 à Frazzanò (Messine, Sicile) de Cosmano et Costanza. Or l’année de sa naissance, l’enfant fut orphelin de sa mère d’abord puis de son père. C’est la voisine, Lucia, qui l’éleva.
Dès son plus jeune âge, Lorenzo se sentit poussé à pratiquer des pénitences dures ; il se flagellait jusqu’au sang. Mais l’étonnant est qu’au matin, sa chemise était toujours immaculée.
A six ans, Laurent lui demanda de pouvoir étudier en allant au monastère basilien de Troina : il y reçut l’instruction nécessaire tant désirée, mais aussi l’habit et successivement les ordres : à vingt ans, il était prêtre.
Il aimait la solitude et son esprit de pénitence le rendait déjà célèbre ; vers 1145, il alla passer six années dans une grotte avec deux autres moines qui voulaient partager sa solitude ; il y reçut la visite de saint Nicolò Politi (v. 17 août), de saint Luca de Calabre. S’il y subit de terribles assauts de la part du Démon, il reçut aussi de nombreuses consolations divines.
Divinement inspiré, il revint vers 1150 au monastère de Troina, et partit pour celui d’Agira, où les cloches se mirent à sonner tant qu’il n’eut pas donné le baiser de paix à chacun des moines.
On vint voir Lorenzo, lui demander conseil, des prières. En 1152, des ermites vivant dans les Apennins vinrent le prier de venir célébrer Pâques chez eux et il les accompagna.
En 1155, il vint au monastère de Fragalà, pour trois ans. Il y fit construire une petite église, où il prêcha infatigablement aux foules avides d’entendre la parole du prêtre.
A partir de 1158, il partit prêcher dans les Pouilles et en Calabre ; à Reggio Calabria, où sévissait une épidémie de peste, il guérit les malades de corps et d’esprit ; il y eut beaucoup de conversions. Lorenzo y fit reconstruire trois églises en ruines et à son départ, l’archevêque et le duc étaient là pour le remercier.
En 1162, il revint définitivement à Frazzanò. Dans une vision, il sut l’approche de sa mort et les signes grandioses qui allaient l’accompagner. Il eut tout juste le temps de construire l’église dédiée à Tous les Saints pour honorer la Sainte Trinité, et c’est dans cette église qu’advinrent les plus grands miracles où Dieu glorifia son Serviteur fidèle.
Au soir du 30 décembre 1162, Lorenzo rendit à Dieu son esprit. Son corps exhala un parfum suave.
Le culte de Lorenzo Ravì fut immédiat et a traversé les siècles, tant de la part de l’Eglise orthodoxe que de la catholique. Il n’y a pas eu de canonisation proprement dite, mais le Martyrologe mentionne à présent Laurent au 30 décembre.
Richard d’Adwerth
† 1266
Richard était d’origine anglaise.
Venu étudier à Paris, il se diplôma en sciences et en lettres.
Une recluse inconnue lui aurait prédit qu’il irait en Frise et que son étoile y brillerait.
Il vint effectivement en Frise, mais pour entrer au monastère cistercien d’Adwerth (Groningue, Hollande).
Il y enseigna, mais surtout il affectionna tant la prière liturgique, qu’il la répétait ensuite pendant son travail de la journée.
Richard mourut, apparemment le 21 décembre 1266, mais son Ordre a inscrit son dies natalis au 30 décembre.
Un siècle plus tard, l’abbé tenta de le faire canoniser, mais y renonça devant les frais occasionnés par une telle procédure.
Le bienheureux Richard n’est donc pas mentionné au Martyrologe.
Margherita Colonna
1255-1284
La bienheureuse Margherita (Marguerite) naquit à Palestrina en 1255, fille de Oddone (Odon) Colonna et de Mabilia Orsini, qui eurent deux autres enfants : Giovanni et Giacomo. Elle appartenait donc à deux familles romaines puissantes qui, pendant plusieurs siècles, marquèrent l’histoire de la Ville Eternelle par des phases successives de paix et de haine réciproque.
Palestrina était la place-forte de la famille. La richesse des nobles romains était liée aux pontifes et aux charges ecclésiastiques : en ce qui concerne les Colonna au temps de la Bienheureuse, il suffit de citer Giovanni, cardinal de Sainte-Praxède en 1212 et légat du pape pendant la cinquième Croisade. C’est ce dernier qui rapporta à Rome la colonne qui, selon la tradition, servit pour la flagellation du Christ et qui, encore aujourd’hui, est conservée dans la basilique romaine dont il était titulaire.
Les années où vécut Margherita furent pour l’Eglise des années difficiles et agitées : de 1268 à 1271, le siège papal fut vacant, ce qui ne s’était jamais vu aussi longtemps dans l’histoire. Cela faisait vingt années que le pape n’habitait plus à Rome. Des conclaves interminables, des pontificats très brefs : le pouvoir du pontife, si fondamental pour l’équilibre du monde chrétien, subissait l’antagonisme entre la France (car Charles d’Anjou occupait beaucoup de régions d’Italie) et le Saint Empire Romain Germanique.
Très tôt, Margherita et ses deux frères furent orphelins. Tandis qu’on la destinait à un mariage prestigieux, important pour les alliances nobiliaires, elle n’avait au contraire qu’une préférence dans son cœur, demeurer l’épouse virginale de Jésus-Christ. Le 6 mars 1273, avec deux dames pieuses de sa maison, elle se retira à Castel San Pietro, une colline qui domine Palestrina, près de l’église de Santa Maria della Costa, pour suivre sa vocation sur la trace du mouvement franciscain. François d’Assise était mort depuis quarante-sept ans, Claire depuis seulement vingt ans : leur idéal de vie fascinait un grand nombre de personnes de tout rang social.
Margherita reçut la rude bure, sous laquelle elle mit un cilice. Elle commença des jeûnes et des pénitences, priant pour que se réalisât son désir : devenir clarisse. Elle vécut donc là, retirée, pendant quelques années. Pour la puissante famille Colonna, cette vie d’anachorète était un véritable scandale.
Le réconfort arriva cependant grâce à son frère Giacomo, lequel, quoique très jeune, était déjà cardinal (depuis 1278) par volonté du pape Nicolas III (dans le monde Giovanni Gaetano Orsini), tandis que Giovanni était sénateur à Rome. Bien qu’il fût revêtu de son titre uniquement en raison de son appartenance à une famille importante, comme cela était habituel en ces temps-là, Giacomo éprouvait un amour sincère pour le Christ. Il conduisit Margherita à Rome, et tous deux prièrent ensemble sur la tombe des Apôtres Pierre et Paul.
C’est ainsi que Margherita commença une nouvelle vie. Elle ne disposait plus de l’héritage familial si abondant : elle avait désormais la Pauvreté, qui ne manque jamais sur la route des Saints.
Son exemple lumineux suscitait un grand intérêt, surtout parmi d’autres dames désireuses comme elle de mettre leur vie au service de Jésus-Christ.
Elle demanda au Supérieur Général des Frères Mineurs, Girolamo Masci, le futur pape Nicolas IV, la permission d’entrer au Monastère d’Assise. Une maladie l’en empêcha : autres étaient les voies du Seigneur.
Sa pensée alla ensuite vers le Couvent de la Mentola (qui se trouvait entre Palestrina et Tivoli, et où l’on vénérait une image de la Très Sainte Vierge à laquelle elle était très dévote ; saint François aussi s’y était rendu). Mais ce couvent dépendait du Comte de Poli, qui ne voyait pas d’un bon œil une fille Colonna arriver dans ses territoires.
Elle retourna donc à la maison et, avec l’aide de son frère cardinal, fonda un monastère sur la montagne voisine : là, pauvrement, de jour comme de nuit, on louait et l’on priait le Seigneur. Margherita s’occupa de la formation de ses compagnes, mais sa charité alla bien au-delà, touchant aussi les malades et les pauvres alentour. Chaque année, à la Saint-Jean-Baptiste - dont elle était très dévote - elle organisait un repas pour eux.
La tradition rapporte qu’un jour Jésus et Jean-Baptiste se présentèrent à sa table, mais qu’ils disparurent quand Margherita les reconnut.
Quand elle eut épuisé son important patrimoine personnel, elle qui était née dans l’opulence tendit la main pour demander l’aumône et pouvoir ainsi continuer ses œuvres. Entre autres, on se souvient de son assistance aux Frères Mineurs du couvent de Zagarolo, à un moment de grave nécessité.
Son union avec le Christ devint de plus en plus intense : elle reçut de façon visible le réconfort de Jésus, de Sa Mère et de saint François. Elle eut plusieurs extases et supporta patiemment pendant sept années une blessure ulcéreuse au côté, qu’elle considéra comme une marque de la Passion de Jésus.
Elle n’avait pas trente ans à sa mort, une mort qui fut précieuse aux yeux du Seigneur. Elle rendit l’esprit, à la suite de son ulcère et de violents accès de fièvre, le 30 décembre 1284.
Immédiatement son tombeau devint un lieu de pèlerinages, et des grâces étaient obtenues par son intercession. En 1285 le pape Honorius IV donna l’autorisation à la communauté de Clarisses de se transférer à Rome, dans le monastère de Saint-Silvestre-in-Capite, où celles-ci transportèrent le corps vénéré de la Bienheureuse (il y restera jusqu’en 1871). Sa biographie fut écrite par son frère et la première abbesse de Saint-Silvestre.
Le 17 septembre 1847, le pape Pie IX confirma le culte “ab immemorabili” (de temps immémorial) ainsi que la mémoire liturgique le 17 décembre. Quelques années plus tôt, le pape Grégoire XVI avait établi que seules les familles Colonna et Orsini eussent le privilège exclusif de Princes assistants au trône pontifical.
Aujourd’hui, les reliques de la bienheureuse Margherita sont vénérées dans l’église de Castel San Pietro, proche de Palestrina. Là, la semence qu’elle jeta en terre il y a plus de sept siècles, continue de fleurir encore aujourd’hui, grâce aux Clarisses du monastère de Sainte-Marie-des-Anges.
Le Martyrologe Romain la mentionne le 30 décembre, son dies natalis (le jour de sa mort, qui est le jour de sa naissance au ciel).
Eugenia Ravasco
1845-1900
Elle naquit le 4 janvier 1845 à Milan, troisième des six enfants de parents aisés, Francesco Matteo et Carolina Mozzoni Frosconi.
La maman mourut dès 1848, de sorte que le papa alla s’installer à Gênes avec son fils aîné et sa dernière fille. Eugenia resta à Milan chez sa tante, qui s’en occupa vraiment comme une mère très chrétienne.
En 1852, la famille se réunit à Gênes, mais le papa mourut à son tour en 1855, de sorte qu’Eugenia fut recueillie chez son oncle Ravasco qui vivait aussi à Gênes. Cet oncle avait déjà dix enfants, et se prodigua pour élever avec le même amour ses neveux et nièces. Il voyait avec inquiétude grandir en Italie l’influence de la Maçonnerie, en tout particulier sur le cœur du frère aîné d’Eugenia, Ambrogio.
Eugenia fut très vite attirée par l’Eucharistie et la dévotion envers les Cœurs de Jésus et Marie, en même temps qu’animée par un réel amour envers le Prochain.
Elle fit sa Première communion en 1855 et reçut la Confirmation. Dès lors, elle ne passait jamais devant une église sans s’y arrêter pour prier et adorer.
En 1862, mourut ce cher oncle bienfaiteur. Eugenia fit tout ce qu’elle put pour ramener son frère Ambrogio à de saines idées, mais sans succès apparent.
En 1863, elle se consacra à Dieu, tandis que, dans la famille, on avait d’autres espérances pour elle.
Elle s’occupa de catéchèse, collabora avec les Filles de l’Immaculée, avec les Dames de la Charité. La famille n’appréciait pas ce genre de contacts, d’une autre classe que celle d’Eugenia, qu’on commençait à mépriser. Mais Eugenia avait du caractère, et persévéra sur sa route. Avec d’autres collègues, elle commença à réunir des petites fillles pour les occuper sainement et saintement.
Finalement, en 1868, l’Esprit Saint la poussa à fonder pour de bon un nouvel Institut : la Congrégation des Filles des Sacrés Cœurs de Jésus et de Marie, dont la mission devait être de faire le bien, surtout envers la jeunesse, souvent abandonnée à elle-même, pour former d’honnêtes citoyens en société et des Saints au Ciel.
En 1878, contre vents et tempêtes, et malgré les attaques maçonniques, elle ouvrit une école pour la formation de maîtresses, elle organisa des exercices spirituels, des retraites, des missions, provoquant ainsi le retour de beaucoup d’âmes à Dieu, notamment des prisonniers et des mourants.
L’Institut fut approuvé dans le diocèse en 1882 et, en 1884, Eugenia fit la profession religieuse en même temps que ses Collègues.
En 1892, elle ouvrit encore une Maison pour les jeunes ouvrières à Gênes, et fonda pour ces ouvrières l’Association Santa Zita.
Elle tomba malade et mourut - trop tôt aux yeux du monde ! le 30 décembre 1900 à Gênes, tout à la fin du 19e siècle. Deux jours plus tard, elle aurait été la première Sainte du 20e siècle !
L’Institut devint de droit pontifical en 1909. Actuellement, il compte plusieurs centaines de Religieuses, présentes en Italie, en Suisse, en Albanie, en Afrique, dans une grande partie de l’Amérique latine et aux Philippines.
Eugenia Ravasco fut béatifiée en 2003.
Giovanni Maria Boccardo
1848-1913
Giovanni (Jean) Ottavio Maria naquit le 20 novembre 1848 à Cà Bianca (Testona, Moncalieri - en piémontais Moncalé -, Turin, Italie NO), aîné des dix enfants de Gaspare et de Giuseppina Malerba. Des dix enfants, trois moururent en bas âge, et trois se donnèrent à Dieu ; deux furent prêtres, Giovanni et son frère Luigi qui, né en 1861, fut le filleul de Giovanni et, plus tard, son vicaire de paroisse ; Giacinta, elle, entra au couvent en 1874.
En 1861, Giovanni entra au lycée des Barnabites. Sur son chemin, il aidait chaque jour un pauvre aveugle avant d’arriver à l’école.
En 1864, il entra au séminaire.
Quand il confia à son père son désir d’être prêtre, celui-ci lui répondit : D’accord, à condition que tu soies un vrai prêtre, pas seulement avec la soutane, mais avec les actes. Le garçon allait correspondre tout-à-fait au désir de son père.
Ordonné prêtre en 1871, il fut dès 1873 directeur spirituel aux séminaires de Chieri, puis de Turin, persuadé que, pour conduire de futurs prêtres sur le chemin de la sainteté, il devait donner le premier l’exemple d’une vie totalement vertueuse et sainte.
En 1877, il fut reçu docteur en théologie.
En 1882, il fut nommé curé à Pancalieri, où il restera actif jusqu’à sa mort, par la catéchèse, la prédication (y compris dans les paroisses alentour), les visites aux prisonniers. Il institua une pieuse association qu’il appela la Cour de Marie et favorisa la bonne presse.
Lors de la terrible épidémie de choléra de 1884, il se prodigua avec quelques jeunes paroissiennes pour aller porter secours aux malades ; mais surtout il fonda cette année-là un hôpital à Moncalieri même : pour s’occuper des malades, il accueillit une, puis plusieurs paroissiennes qui se constituèrent en une nouvelle Congrégation, les Pauvres Filles de Saint-Gaetan, qui se multiplièrent dans trente-deux maisons que le Fondateur ouvrit dans le Piémont et les Marches, au service des malades abandonnés, des vieillards sans ressources, des orphelins, des prêtres malades…
Cette même année aussi lui fut adjoint comme vicaire son propre frère, Luigi (voir au 9 juin), pendant deux années.
Don Giovanni Maria laissa un grand nombre de lettres, réflexions, propositions, contenues dans une quarantaine de volumes.
En 1911, un accident cardio-vasculaire le laissa paralysé, dans l’impossibilité d’exercer le moindre ministère. Sa seule consolation était de se faire porter dans son hôpital, au milieu des malades et des Sœurs.
Il s’éteignit à Pancalieri, le 30 décembre 1913.
L’année suivante, son frère Luigi fut nommé Supérieur Général de la Congrégation.
L’approbation pontificale de l’Institut arriva en 1958, les Sœurs s’étant installées aussi au Brésil, en Argentine, au Bénin.
Giovanni Maria Boccardo fut béatifié en 1998.
Daniel Ferreres Guardiola
1911-1936
Daniel naquit le 29 avril 1911 à Cinctorres (Castellón de la Plana, Catalogne, Espagne E).
Il grandit dans une atmosphère familiale et sociale profondément chrétienne. Son oncle, don Rafael García, était le vicaire général du diocèse.
En 1928, il travaillait dans une Maison pour Vieillards à Lérida (Lleida en catalan), en 1935 il en était un des dirigeants.
Il faisait partie de l’Action Catholique.
Lors de la persécution de 1936, il fut arrêté et battu en pleine rue, puis conduit en prison, où il retrouva son oncle. Il fut compagnon de cellule de Francisco Castelló (v. 29 septembre).
Le 14 décembre 1936, on le soumit à un simulacre de jugement et il fut condamné à mort, pour sa foi, avec d’autres Compagnons.
Le 19 décembre, il put écrire une lettre à sa famille. C’est un document digne d’un Ignace d’Antioche (v. 17 octobre) :
Ne pleurez pas, priez ! Donner sa vie pour Dieu, pour la Patrie, pour la Tradition Catholique, pourriez-vous l’employer mieux que cela ? Alors, pourquoi être tristes ?
Et aussi :
Je pardonne à tous mes ennemis, dans toute l’extension et la signification des mots que nous prononçons dans le Notre Père.
Ils furent fusillés le 30 décembre 1936 à Lleida. Daniel avait vingt-cinq ans. Au moment de monter dans le camion, ils entonnèrent un de leurs chants de l’Action Catholique catalane : Amunt, germans, fem nostra via ! (Courage, frères, nous faisons notre chemin !).
Pour l’heure, seul Daniel fut béatifié, en 2017 ; les autres Compagnons ne font pas partie de la même cause.
Daniel Ferreres Guardiola sera commémoré le 30 décembre dans le Martyrologe Romain.