Anastase
594-628
La merveilleuse histoire d’Anastase nous a été transmise par un témoin oculaire, qui a toutes les garanties d’un témoin honnête et objectif.
Notre héros s’appelait Magundat et naquit vers 594 à Razech (Perse, peut-être act. Resafa, Syrie), fils de Hau, un père qui s’occupait de magie et d’astrologie et qui l’enseigna scrupuleusement à son fils.
Magundat entra dans l’armée. Rappelons ici qu’en 614, les Perses de Chosroès II prirent Jérusalem et emportèrent la précieuse relique de la Croix du Christ. Magundat venait d’être enrôlé, et pouvait donc avoir une vingtaine d’années. Il entendit parler de cette guerre, de la défaite des Chrétiens, de l’exil forcé de ces derniers avec leur patriarche de Jérusalem. Il fut vivement impressionné par l’intérêt que montraient les Chrétiens pour ce qu’il considérait jusqu’alors comme un vulgaire instrument de supplice. Il voulut en savoir plus et interrogea des Chrétiens.
Le témoignage de ces derniers, leur foi, le mystère de la Rédemption par le Sacrifice de Jésus-Christ - et la grâce de Dieu aidant, Magundat se sentit convaincu et voulut embrasser le christianisme. Il quitta l’armée, sa famille et son pays et, nouvel Abraham, vint à Hiérapolis de Syrie, où un orfèvre persan et chrétien l’embaucha. Il lui fit visiter l’église des Saints-Martyrs, où des fresques représentaient des scènes de divers Martyrs. Magundat fut remplii d’admiration pour ces glorieux Soldats du Christ.
Il alla alors à Jérusalem, là où avait été volée cette fameuse Croix, là où était mort et ressuscité Jésus. Un artisan chrétien l’hébergea et l’aida à s’inscrire parmi les catéchumènes. Après avoir été suffisamment instruit, il reçut le baptême, non pas des mains du Patriarche, qui était encore en exil, mais de son vicaire, Modestus, qui lui donna alors un nouveau nom : Anastasis, qui signifie «résurrection».
Anastase cependant désirait davantage encore. Le prêtre qui s’occupait de lui l’adressa au monastère… de Saint-Anastase et à son abbé, Ioustinos. Anastase étudia le grec et le psautier, reçut la tonsure et fut admis dans la communauté. Il y vécut sept années, étudiant l’Ecriture, exécutant les charges les plus humbles, lisant les récits des Pères et des Martyrs. Il finit par en concevoir lui-même un vif désir du martyre.
Il eut une nuit un songe, dans lequel le Christ lui prédisait qu’il serait bientôt martyr à son tour. Il en parla à l’abbé, participa à l’Office et aux Divins Mystères (la Messe), et se mit en marche pour Césarée de Palestine, où Dieu lui avait indiqué le but de son voyage.
Là, il rencontra des soldats persans qui s’adonnaient à la magie. Il leur raconta gentiment comment lui-même avait connu ces incantations, et comment il était devenu chrétien. Les soldats se moquèrent bien de lui, le dénoncèrent au gouverneur, Mazarban. Celui-ci l’interrogea, se moqua aussi de lui et du Christ, lui promit avancement et richesses s’il abjurait, finalement le mit en prison en attendant les ordres du roi local.
L’abbé Ioustinos fut averti des événements ; il envoya à Anastase deux moines pour le soutenir dans l’épreuve : Anastase leur raconta déjà ce qui lui était arrivé ; il eut aussi la visite des anges qui le réconfortaient. L’ordre du roi était : ou l’abjuration, ou la mort. Devant la persévérance d’Anastase, il fut décidé de le déférer au roi des Perses.
Arriva le 14 septembre, jour de l’Exaltation de la Sainte Croix. Un chrétien obtint la permission de conduire Anastase à l’église, où les chrétiens furent très édifiés par ses exhortations et son courage. Le soir, il retourna en prison.
Cinq jours après, on partait pour la Perse ; un des deux moines venus voir Anastase l’accompagnait, et c’est de lui que nous tenons tant de détails sur cette passion. On s’arrêta à Bethsaloé, où un juge commença par interroger Anastase, qui persévéra sans cesse dans son adhésion à la foi chrétienne.
Il subit une bastonnade pendant trois jours ; puis l’horrible supplice de la grosse pièce de bois pesant sur les jambes du supplicié étendu sur le dos ; le juge n’en revenait pas, et de dépit renvoya Anastase en prison, où d’autres Chrétiens vinrent lui rendre visite.
Quinze jours plus tard arriva l’ordre du roi Chosroès : il fallait tuer Anastase sans attendre. Le juge commença par faire étrangler soixante-douze autres Chrétiens sous les yeux d’Anastase ; puis on étrangla Anastase, avant de lui trancher la tête.
C’était le 22 janvier 628.
Le fidèle moine racheta la tête et le corps du Martyr, qui fut enseveli dans la proche église Saint-Serge. Après bien des péripéties, ces reliques arrivèrent à Rome, dans l’église qui s’appelle Saints-Vincent-et-Anastase.
Les Grecs et les Latins fêtent saint Anastase le 22 janvier, comme le mentionne le Martyrologe Romain.