1er dimanche de l’Avent - C
Voici que commence une nouvelle année liturgique, avec le premier dimanche de l’Avent. Dans le cycle triennal des lectures que nous propose l’Eglise, c’est la troisième année, l’année C, durant laquelle nous entendrons l’évangile selon saint Luc.
En signe d’ “attente” jusqu’à Noël, le prêtre revêt un ornement violet à la Messe, et l’on ne chante pas Gloire à Dieu, le chant des Anges que nous entonnerons à nouveau dans la nuit de Noël.
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La prophétie d’aujourd’hui est du prophète Jérémie, qui vivait au sixième siècle avant la naissance de Jésus-Christ. Déjà deux siècles auparavant, le prophète Isaïe avait annoncé l’Emmanuel (Is 7:14). Ici la promesse concerne un Germe de justice.
Immédiatement notre esprit se demande : pourquoi un germe seulement ? n’y avait-il pas de justice avant Jérémie ?
Entendons bien le mot justice au sens biblique : la Justice biblique n’est pas une sentence de condamnation, mais un aspect fondamental de la Sainteté de Dieu. Un verset de psaume le chante très bien : De justice, ta main en est remplie (Ps 47:11b).
Dieu est Saint, et tous ceux qui répondent à l’appel divin acceptent de se mettre sur le chemin de la Sainteté, de la Perfection. Ce sera l’appel que Jésus adressera dans le Sermon sur la Montagne : Heureux ceux qui ont faim et soif de la Justice, ils seront rassasiés (Mt 5:6) : Notre Seigneur n’anticipait-Il pas déjà l’Eucharistie, en proclamant cette béatitude ? En recevant le Corps et le Sang du Christ, c’est un germe de Justice que nous recevons en nous. Voilà donc ce germe de Vie Nouvelle qu’apportera le Sauveur.
La justice au sens biblique n’est pas autre chose que l’amour profond qu’on peut avoir pour Dieu, un amour total, inconditionné, qui de soi exclut le mal. Qui met toute son ardeur à renoncer au mal, fait de Jésus Le-Seigneur-notre-Justice, pour reprendre le texte.
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Le psaume 24 qui vient ensuite reprend la même idée. La “route” du Seigneur est droite ; celui qui s’y engage ne perd pas de temps à s’égarer dans les petits chemins de traverse ; il chemine “droit” devant lui, pour rester dans la Justice, dans le Droit, dans la Vérité. De verset en verset, nous trouvons l’itinéraire de notre chemin vers la Sainteté : voies… route… dirige-moi… vérité… droit… bon… chemin… justice… humbles… amour… et pour finir : alliance.
Retenons particulièrement aujourd’hui l’humilité. Il faut de l’humilité pour se renoncer, accepter qu’on se trompe, qu’on s’est égaré, qu’il faut reprendre la bonne route. Dites à un conducteur : Tu t’es trompé de chemin ! Très difficilement il acceptera son erreur ; c’est pourtant tellement plus simple de se dire : Quel âne je suis !
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L’amour a besoin de l’humilité, qui nous aide à garder le respect pour l’autre. Saint Paul y invite à nouveau les Thessaloniciens aujourd’hui. Il ne leur dit rien de nouveau, il le leur répète pour entretenir en eux cette flamme d’amour qui est toujours fragilisée par le quotidien. Que le Seigneur vous donne un amour de plus en plus intense. Et - de nouveau - qu’il vous établisse fermement dans une sainteté sans reproche.
Les Chrétiens de Thessalonique étaient très fervents déjà, et Paul les aime beaucoup, mais il ne veut pas qu’ils s’assoupissent, il excite leur espérance, leur amour : Faites de nouveaux progrès, car il sait bien que la faiblesse humaine nous tente souvent et que nous retombons si facilement dans la médiocrité, dans la tiédeur ; chacun de nous en fait l’amère expérience chaque jour.
Nous ne serons jamais parfaits, Dieu le sait ; mais Dieu nous demande seulement de prendre sur nous, de tendre sans cesse vers cette perfection. Imaginons ici une petite comparaison.
Il y a deux fumeurs invétérés qui, disent-ils, veulent combattre ce vilain penchant. L’un fume un paquet de cigarettes chaque jour ; l’autre deux. Ce dernier arrive à diminuer de moitié sa consommation, et l’autre, jugeant qu’il en est au même stade, ne diminue pas ; aux yeux des hommes, ils consomment maintenant autant l’un que l’autre, mais aux yeux de Dieu l’un a fait un grand pas vers la perfection, l’autre n’a rien fait.
On pourrait faire le même raisonnement de deux élèves à l’école (et cette époque de premier trimestre en est une bonne occasion). Un élève qui par son travail passe de 8 à 10 de moyenne, même si ce n’est pas un résultat énorme, fait beaucoup plus devant Dieu que celui qui, réussissant plus facilement, se contente de son 12 ou même de son 15 sans chercher à faire mieux.
Chacun de nous a ainsi à travailler pour se rapprocher de la Sainteté. Ceux qui le font sont en paix, ils savent que la Miséricorde de Dieu est immense et ne craignent pas de s’avancer devant l’Eternité, comme Thérèse de l’Enfant Jésus qui murmurait : Je ne meurs pas, j’entre dans la vie. Ceux au contraire qui refusent ce chemin, n’auront que des angoisses quand sonnera “la fin”.
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C’est ainsi qu’il faut interpréter l’évangile d’aujourd’hui. “Mourir de peur” n’est pas fait pour les fidèles, à qui Jésus dit d’ailleurs : Redressez-vous, relevez la tête !
N’oublions pas le triple avertissement de Jésus, qui nous met en garde contre la débauche, l’ivrognerie, les soucis de la vie. Pour les deux premiers, hélas, on ne connaît que trop les dégâts qu’ils provoquent dans les familles et dans tous les milieux… Mais comment éviter “les soucis de la vie”, qui nous tombent inéluctablement dessus, parfois même à des moments vraiment pas heureux ?
Cela dépendra de notre amour de Dieu et de notre confiance. Il y a une façon de recevoir ces soucis, qui les multiplie et les grossit, tandis que les recevoir avec humilité, avec patience, avec esprit de soumission à la volonté de Dieu, sans révolte, aide beaucoup à les dépasser, voire même à trouver des solutions viables auxquelles on ne pensait pas auparavant.
On pourra aussi se demander pourquoi l’Eglise nous rappelle la fin des temps, quand on évoque l’annonce de la naissance de Jésus-Christ. C’est que Jésus-Christ n’est pas simplement venu il y a vingt siècles pour les gens de cette époque ; il doit venir pour chacun de nous, maintenant, avec son message d’amour et son appel à la conversion profonde ; nous ne devons pas nous contenter de nous rappeler le passé, la naissance historique de Jésus-Christ, mais nous devons marcher à Sa rencontre : demain, après-demain, bientôt, nous comparaîtrons devant Lui.
Et surtout Il reviendra un jour pour établir définitivement son Royaume, ce Royaume d’Amour dont nous parlions dimanche dernier en la solennité du Christ-Roi.
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En priant intensément la Prière de ce jour, nous allons voir que tout cela y est exprimé :
Donne à tes fidèles d’aller avec courage sur les chemins de la justice à la rencontre du Seigneur, pour qu’ils soient appelés, lors du jugement, à entrer en possession du Royaume des cieux.