01 AVRIL
I.
S Ctésiphon, évêque à Vierze.
II.
S Méliton, évêque à Sardes, dont l’homélie sur la Pâque, récemment reconstituée à partir de fragments, est la plus ancienne homélie connue sur le mystère pascal.
III.
S Venantius, évêque à Salone et martyr à Rome, avec des compagnons : Anastasius, Maurus, Paulinianus, Asterius, Septimius, Antiochianus et Gaianus.
?
S Venantius, évêque à Rimini et martyr, dont le corps fut transporté à Goslar.
IV.
Stes Agapi et Chionia, deux sœurs ; elles furent brûlées vives à Thessalonique pour avoir caché les Livres Saints chez elles et refusé de manger des viandes offertes aux dieux païens ; leur sœur Ireni mourut le 5 avril.
S Prudence, évêque à Atino et martyr.
V.
Ste Maria l’Egyptienne, pécheresse convertie à Jérusalem et solitaire pendant près de cinquante ans.
VII.
S Valery, auvergnat, abbé à Luxeuil puis à Leuconay, où l’abbaye prit son nom plus tard ; il ressuscita un pendu.
S Berchond, évêque à Amiens, ami de s. Valery (cf. ci-dessus).
S Leuconius, évêque à Troyes.
S Dodolin, évêque à Vienne.
IX.
S Jean IV, évêque à Naples, qu’on a appelé “le Scribe”.
X.
Ste Marcelle, bergère à Chauriat.
XII.
B Lanzon, “le plus parfait religieux de son siècle”, bénédictin à Cluny puis prieur à Londres.
S Ceallach, évêque à Armagh.
S Hugues, évêque à Grenoble pendant un demi-siècle ; il lutta contre la simonie et le concubinage des prêtres, reçut s. Bruno auquel il donna les territoires de la Grande Chartreuse, et fut canonisé deux ans après sa mort.
B Hugues de Bonnevaux, neveu du précédent, cistercien en Bourgogne et abbé à Bonnevaux ; il réussit à réconcilier l’empereur et le pape.
XIII.
S Gilbert, évêque à Caithness où il construisit la cathédrale.
XV.
S Nuno Alvares Pereira, connétable du Portugal, frère carme à soixante-deux ans, très marial ; il mourut au moment où on lui lisait le passage de la Passion : "Voici ta mère" ; canonisé en 2009 (le 1er novembre au Martyrologe).
XVI.
B John Bretton, père de famille anglais, martyr pendu à York.
XVII.
Bse Zofia Czeska Maciejowska, veuve polonaise, fondatrice des Sœurs de la Présentation de la Sainte Vierge Marie, pour l'éducation des filles, béatifiée en 2013.
XIX.
Bse Sim A-gi Barbara, jeune fille laïque coréenne martyre, enterrée vivante, un jour inconnu du mois d’avril, béatifiée en 2014.
S Lodovico Pavoni, prêtre à Brescia, fondateur de la Congrégation des Fils de Marie Immaculée pour la formation chrétienne des jeunes les plus pauvres, béatifié en 2002, canonisé en 2016.
B Yun Bong-mun Iosephus, laïc coréen martyr, par pendaison, béatifié en 2014.
XX.
B Karl Ier d’Autriche (1887-1922), empereur d’Autriche-Hongrie, qui finit misérablement ses jours en exil après la première guerre mondiale ; avec son épouse Zita ils eurent huit enfants ; béatifié en 2004.
Bx José Anacleto González Flores (*1888), juriste, José Dionisio Luis Padilla Gómez (*1899), les deux frères Jorge Ramón (*1899) et Ramón Vicente (*1905) Vargas González, laïcs mexicains martyrs en 1927 (le Vendredi Saint) et béatifiés en 2005.
B Giuseppe Girotti (1905-1945), prêtre dominicain italien, martyr à Dachau, béatifié en 2013.
B Marin Shkurti (1933-1969), prêtre albanais martyr, béatifié en 2016.
Méliton de Sardes
2e siècle
L’intérêt de parler de cet évêque n’est pas dans les détails de sa vie, que nous ne connaissons pratiquement pas, mais pour l’excellence de ses écrits, et tout particulièrement pour son homélie sur la Pâque, tout récemment reconstituée à partir de fragments, dont on citera tout-à-l’heure deux longs passages.
Méliton fut évêque de Sardes en Lydie, au second siècle, sous les empereurs romains Antonin le Pieux († 161) et Marc-Aurèle († 180). Sa mort doit se placer avant 190.
Sardes était encore importante au début du christianisme : saint Jean la mentionne dans l’Apocalypse (Ap 1:11 ; 3:1-6). Les restes archéologiques de Sardes se trouvent non loin de l’actuelle Salihli, non loin de Izmir, le port de Smyrne, sur la mer Egée, en Turquie orientale. C’est à Sardes que vécut le fameux Crésus. Sardes fut conquise par Cyrus, puis par Alexandre le Grand, puis par les Romains.
Parlant de Méliton de Sardes, l’évêque Polycrate d’Éphèse, qui vivait vingt ans après lui, atteste que toutes ses actions furent animées de l’Esprit de Dieu.
Consulté par les fidèles de son temps sur l’autorité de l’Écriture sainte, il fit un voyage en Palestine pour apprendre quels étaient les véritables livres de l’Ancien Testament et dans quel ordre on devait les ranger. Il composa une Apologie adressée à l’empereur Marc-Aurèle en faveur des chrétiens. On lui a attribué d’autres ouvrages ; Eusèbe en a donné le titre d’une vingtaine. De tout cela, en dehors des citations d’Eusèbe et d’Anastase le Sinaïte, il ne subsiste que des fragments grecs et syriaques qui ne sont pas tous d’une authenticité garantie. Tertullien et saint Jérôme ont qualifié Méliton d’excellent orateur et d’habile écrivain.
Polycrate se contente de dire que le corps de Méliton repose dans la ville de Sardes. Le Martyrologe Romain ne le mentionne pas actuellement, sans doute par manque d’informations historiques suffisantes, ce qui n’enlève rien à sa gloire.
Même le bréviaire de cite pas saint Méliton ; certains martyrologes lui ont donné ce titre glorieux et l’ont mentionné au 1er avril, selon l’ancienne tradition de l’Eglise d’Asie, et les Bollandistes semblaient suivre cette opinion.
Voici maintenant les deux passages de son Homélie sur la Pâque, repris dans la Liturgie des Heures (le Jeudi Saint et le Lundi de Pâques).
Bien des choses ont été annoncées par de nombreux prophètes en vue du mystère de Pâques qui est le Christ : à lui la gloire pour les siècles des siècles. Amen.
C’est lui qui est venu des cieux sur la terre en faveur de l’homme qui souffre ; il a revêtu cette nature dans le sein de la Vierge et, quand il en est sorti, il était devenu homme ; il a pris sur lui les souffrances de l’homme qui souffre, avec un corps capable de souffrir, et il a détruit les souffrances de la chair ; par l’esprit incapable de mourir, il a tué la mort homicide.
Conduit comme un agneau et immolé comme une brebis, il nous a délivrés de l’idolâtrie du monde comme de la terre d’Egypte ; il nous a libérés de l’esclavage du démon comme de la puissance de Pharaon ; il a marqué nos âmes de son propre Esprit, et de son sang les membres de notre corps.
C’est lui qui a plongé la mort dans la honte et qui a mis le démon dans le deuil, comme Moïse a vaincu Pharaon. C’est lui qui a frappé le péché et a condamné l’injustice à la stérilité, comme Moïse a condamné l’Egypte.
C’est lui qui nous a fait passer de l’esclavage à la liberté, des ténèbres à la lumière, de la mort à la vie, de la tyrannie à la royauté éternelle, lui qui a fait de nous un sacerdoce nouveau, un peuple choisi, pour toujours. C’est lui qui est la Pâque de notre salut.
C’est lui qui endura bien des épreuves en un grand nombre de personnages qui le préfiguraient : en Abel il a été tué ; en Isaac il a été lié sur le bois ; en Jacob il a été exilé ; en Joseph il a été vendu ; en Moïse il a été exposé à la mort ; dans l’agneau il a été égorgé ; en David il a été en butte aux persécutions ; dans les prophètes il a été méprisé.
C’est lui qui s’est incarné dans une vierge, a été suspendu au bois, enseveli dans la terre, ressuscité d’entre les morts, élevé dans les hauteurs des cieux.
C’est lui, l’agneau muet ; c’est lui, l’agneau égorgé ; c’est lui qui est né de Marie, la brebis sans tache ; c’est lui qui a été pris du troupeau, traîné à la boucherie, immolé sur le soir, mis au tombeau vers la nuit. Sur le bois, ses os n’ont pas été brisés ; dans la terre, il n’a pas connu la corruption ; il est ressuscité d’entre les morts et il a ressuscité l’humanité gisant au fond du tombeau.
Comprenez-le, mes bien-aimés : le mystère de la Pâque est ancien et nouveau, provisoire et éternel, corruptible et incorruptible, mortel et immortel.
Il est ancien en raison de la Loi, mais nouveau en raison du Verbe ; provisoire en ce qu’il est figuratif, mais éternel parce qu’il donne la grâce ; corruptible puisqu’on immole une brebis, mais incorruptible parce qu’il contient la vie du Seigneur ; mortel, puisque le Seigneur est enseveli dans la terre, mais immortel par sa résurrection d’entre les morts.
Oui, la Loi est ancienne, mais le Verbe est nouveau ; la figure est provisoire, mais la grâce est éternelle ; la brebis est corruptible, mais le Seigneur est incorruptible, lui qui a été immolé comme l’agneau, et qui ressuscita comme Dieu.
Car il a été conduit comme une brebis vers l’abattoir, alors qu’il n’était pas une brebis ; il est comparé à l’agneau muet, alors qu’il n’était pas un agneau. En effet, la figure a passé, et la vérité a été réalisée : Dieu a remplacé l’agneau, un homme a remplacé la brebis, dans cet homme, le Christ, qui contient toute chose.
Ainsi donc, l’immolation de la brebis et le rite de la Pâque et la lettre de la Loi ont abouti au Christ Jésus en vue de qui tout arriva dans la loi ancienne et davantage encore dans l’ordre nouveau.
Car la Loi est devenue le Verbe, et, d’ancienne, elle est devenue nouvelle (l’une et l’autre sorties de Sion et de Jérusalem), le commandement s’est transformé en grâce, la figure en vérité, l’agneau est devenu fils, la brebis est devenue homme et l’homme est devenu Dieu.
Le Seigneur, étant Dieu, revêtit l’homme, souffrit pour celui qui souffrait, fut enchaîné pour celui qui était captif, fut jugé pour le coupable, fut enseveli pour celui qui était enseveli. Il ressuscita des morts et déclara à haute voix : Qui disputera contre moi ? Qu’il se présente en face de moi ! C’est moi qui ai délivré le condamné ; c’est moi qui ai rendu la vie au mort ; c’est moi qui ai ressuscité l’enseveli. Qui ose me contredire ? C’est moi, dit-il, qui suis le Christ, qui ai détruit la mort, qui ai triomphé de l’adversaire, qui ai lié l’ennemi puissant, et qui ai emporté l’homme vers les hauteurs des cieux ; c’est moi, dit-il, qui suis le Christ.
Venez donc, toutes les familles des hommes, pétries de péchés, et recevez le pardon des péchés. Car c’est moi qui suis votre pardon, moi la Pâque du salut, moi l’agneau immolé pour vous, moi votre rançon, moi votre vie, moi votre résurrection, moi votre lumière, moi votre salut, moi votre roi. C’est moi qui vous emmène vers les hauteurs des cieux ; c’est moi qui vous ressusciterai ; c’est moi qui vous ferai voir le Père qui existe de toute éternité ; c’est moi qui vous ressusciterai par ma main puissante.
Venantius de Salone
† 257
Venantius serait le premier évêque (connu) de Salone (Dalmatie, auj. Split, Croatie), de 250 à 257.
Autrefois, on affirmait que ce même diocèse avait été fondé dès le premier siècle, et que Venantius avait été précédé de six évêques.
Il aurait subi le martyre en 257.
Toutefois, le Martyrologe Romain lui adjoint quelques Compagnons, dont on ne connaît que les noms : Anastasius, Maurus, Paulinianus, Telius, Asterius, Septimius, Antiochianus et Gaianus. Venantius y est qualifié d’évêque, sans précision de son siège épiscopal.
Peut-être tous ces Martyrs ont-ils été inhumés à Rome, après une translation.
Saint Venantius de Salone est commémoré le 1er avril dans le Martyrologe Romain.
Agapi et Chionia de Thessalonique
† 304
Les trois sœurs Agapi, Chionia et Ireni vivaient à Thessalonique, chez leurs parents, qui n’étaient pas chrétiens.
Leurs noms étaient tout symboliques : Amour, Pureté et Paix.
L’édit de Dioclétien ayant en 303 interdit de conserver les Livres saints, les trois sœurs cachèrent ceux qu’elles avaient, sans en parler à personne.
L’année suivante cependant, on découvrit la cachette et les Livres ; elles furent dénoncées et présentées au gouverneur.
En même temps qu’elles, étaient aussi présentés Cassia, Philippa et Eutychia, ainsi qu’un nommé Agathon.
Fermement, elles refusèrent de manger de la viande offerte aux dieux païens, et furent condamnées à être brûlées vives.
Agapi et Chionia moururent le 1er avril, Ireni le 5.
Les Actes de ces trois Martyres ne parlent pas du sort des autres Compagnons.
Saintes Agapi et Chionia sont commémorées le 1er avril dans le Martyrologe Romain.
Maria l’Egyptienne
† 422
Maria raconta elle-même qu’elle vivait en Egypte et qu’elle quitta ses parents à douze ans, pour aller se prostituer en Alexandrie, pendant dix-sept années.
Elle eut l’occasion de faire un voyage à Jérusalem, et réussit à corrompre encore beaucoup de jeunes gens qu’elle rencontra sur le bateau du voyage et à Jérusalem même.
Le jour où l’on fêtait la Croix glorieuse du Christ, elle crut pouvoir se mêler à la foule qui entrait dans la basilique, mais une force invisible la cloua sur place.
La grâce de Dieu lui fit alors comprendre que c’étaient ses péchés qui lui barraient l’entrée du sanctuaire. Elle se tourna vers une icône de Marie, la pure Vierge, Mère de Dieu, promettant de renoncer à sa vie de débauche. Elle put alors s’approcher de la Croix et la vénérer humblement, se sentant acceptée dans le Pardon miséricordieux de Dieu. C’était en 373.
Une voix intérieure l’invita à franchir le Jourdain pour y trouver le repos.
En l’église Saint-Jean-Baptiste, elle se confessa et communia. Puis elle organisa sa vie dans le désert, pendant quarante-sept ans.
D’abord, elle se nourrit seulement d’herbes et de racines sauvages, pendant dix-sept ans, comme pour expier les dix-sept années de son péché de jeunesse.
Les épreuves cependant l’assaillaient : le souvenir de ses péchés, ses convoitises, les chansons lascives : pour vaincre la tentation, il lui arrivait de rester prosternée à terre, en larmes, pendant un jour et une nuit entière ; elle fut fidèle à sa promesse envers Marie à Jérusalem. Elle eut alors la grâce de vivre encore trente années dans la paix, sans voir personne.
En 421, un moine nommé Zosime (v. 4 avril ?), s’avança dans ce même désert et rencontra Maria. C’est à lui qu’elle dévoila le secret de sa vie. Elle lui demanda alors de revenir l’année suivante pour lui apporter l’Eucharistie, qu’elle n’avait plus reçue depuis le jour de sa conversion à Jérusalem. En même temps, elle lui confiait un conseil à transmettre à son supérieur, Jean, que d’ailleurs elle ne connaissait pas.
L’année suivante, Zosime fut fidèle au rendez-vous ; il vit Maria passer le Jourdain à pieds secs pour venir à sa rencontre. Elle reçut le Corps du Christ et pria Zosime de revenir encore une fois l’année suivante.
Zosime revint : il trouva Maria comme endormie sur le sol ; elle avait écrit dans le sable : Je suis décédée la nuit du Vendredi saint, juste après avoir reçu l’Eucharistie.
Maria était donc morte le 1er avril 422. Son corps était resté sans corruption pendant un an.
Le récit de cette admirable conversion fut transmis par Zosime lui-même. Quelques historiens ont cherché à le mettre en doute ; dans l’histoire de l’Eglise, ce n’est pas l’unique cas de conversion radicale, où l’on découvre combien est immense la Miséricorde de Dieu.
Sainte Maria l’Egyptienne est commémorée le 1er avril dans le Martyrologe Romain.
Valery de Leuconay
565-619
Valericus était natif d’Auvergne, vers 565. Ses parents, pauvres, lui firent garder les troupeaux.
Durant ces heures, le garçon réussit à se faire enseigner l’alphabet, au point qu’il pouvait lire le psautier.
Un jour qu’il accompagna son oncle dans un monastère bénédictin d’Issoire, il ne voulut plus en repartir. L’abbé le prit sous sa protection et lui donna l’habit peu après.
Le jeune moine montra un réel amour de la sainteté et se perfectionna dans les saintes vertus de prudence, de patience, sans oublier la mortification des sens et une profonde piété. Il voulut cependant se détacher davantage de son milieu et partit pour Auxerre, où il fut admis dans le monastère Saint-Germain.
Un seigneur nommé Bobon entendit parler de ce jeune moine exemplaire et, l’ayant rencontré, changea totalement de vie. En 595, ils allèrent tous les deux frapper à la porte du monastère de Luxeuil, où se trouvait encore son fondateur, Colomban (v. 23 novembre). Là, on perd de vue le brave Bobon.
Selon la règle de Colomban, pour être admis, on devait d’abord s’occuper à cultiver la terre. Or il se trouva que les terrains étaient alors infestés d’insectes rongeurs ; mais Dieu fit voir la sainteté de Valery, dont la portion de jardin restait absolument épargnée et fertile. L’humble Valery eut beau rejeter la «responsabilité» du phénomène sur la sainteté des moines, Colomban comprit celle de son nouveau disciple et l’admit sans attendre.
Colomban ayant dû s’exiler à Bobbio en 610, l’abbé Eustase chercha à l’en ramener et, pendant son absence, confia la direction du monastère à Valery. Après quoi, Valery accompagna un autre moine, Waldolène, dans sa mission au Nord de la Gaule.
Près d’Amiens, au lieu-dit Gamaches, Valery ressuscita par sa prière un condamné qu’on venait de pendre. Mais comme le seigneur de l’endroit voulait pendre une deuxième fois son condamné, Valery s’interposa vivement et obtint la grâce de l’homme. Il y eut à Amiens une chapelle commémorant l’épisode.
C’est l’évêque d’Amiens, Berchond (v. 1er avril ?) qui indiqua à Valery et Waldolène un endroit pour se livrer à la contemplation : Leuconaus, où s’éleva bientôt l’abbaye de Leuconay (613). Les moines y vécurent selon la Règle de Colomban. Ce fut la première abbaye fondée dans le diocèse d’Amiens.
Il y a lieu de parler ici de quelques-uns des miracles accomplis par Valery Un malade nommé Blimont, qui pouvait à peine se tenir debout, fut si bien guéri qu’il ne voulut plus se séparer de Valery et lui succéda comme abbé (Blimont dut reconstruire le monastère, pillé par les Normands, et fut ainsi à l’origine de la ville de Saint-Valery-sur-Somme). Un autre encore, mortellement malade, fut guéri par Valery qui ajouta cependant que, s’il prenait au retour quelque autre remède, il en garderait une marque toute sa vie : l’homme prit une potion préparée par sa femme… et resta borgne pour le reste de ses jours. Un jour de froid où Valery implorait d’un prêtre de l’abriter, ce dernier, ainsi que le juge présent chez lui, le lui refusèrent et l’accablèrent d’injures ; Valery se retira et Dieu rendit aveugle le malheureux prêtre, tandis que le juge mourait peu après d’un mal affreux.
Aussi doux pour les moines qu’il était dur pour lui-même, Valery n’appliqua que rarement les sévères punitions prévues par la Règle de Colomban ; de la rigidité de la règle, il n’avait pris que l’huile de l’onction.
Valery n’avait pour couche qu’une claie d’osier recouverte de feuilles, pour vêtement qu’une grossière tunique avec une capuche ; il ne mangeait que le dimanche.
Après quelques années, Valery comprit que son heure approchait. Il s’éteignit en effet le 1er avril 619 (ou peut-être 622), et la chapelle édifiée plus tard sur son tombeau, en haut du Cap Hornu, plusieurs fois reconstruite, est l’actuelle Chapelle des Marins.
De l’abbaye, qui devint carrière de pierre sous la Révolution, il ne reste pas grand-chose.
Saint Valery est commémoré le 1er avril dans le Martyrologe Romain.
Ceallach d’Armagh
1079-1129
Ceallach (qui est devenu Celse en français) naquit en 1079 dans une noble famille d’Irlande.
Il était de tradition, dans cette famille, de «posséder» le siège métropolitain d’Armagh, qui ne devait être gouverné que par un des leurs, clerc ou laïque, même marié. Quand vint le tour de Ceallach, celui-ci voulut donner à Dieu ses droits et supprima cette clause, comme on le verra plus bas.
Ceallach, donc, s’employa à visiter les comtés de l’île, Ulster et Munster en 1106, Connaught et Meath en 1108 et 1110.
En 1112 il réunit un synode de tous les évêques d’Irlande.
Il reconstruisit à ses frais les édifices religieux détruits par l’incendie, dont la grande église d’Armagh ; il réconcilia les princes de Connaught et de Munster, qui n’en finissaient pas de s’affronter par la guerre.
Après une vie d’austérité et de labeurs, il établit que son successeur serait le moine Malachie, auquel il avait conféré les saints ordres et qu’il avait sacré évêque de Connor.
Ceallach mourut le 1er avril 1129 à Ard Patrick.
Son successeur fut bien Malachie, qui ne put toutefois accéder à son siège qu’après cinq années de discussions (v. 2 novembre).
Saint Ceallach est commémoré le 1er avril dans le Martyrologe Romain.
Hugues de Grenoble
1053-1132
Né à Châteauneuf-sur-Isère en 1053, Hugues était un des fils d’Odilon, officier valeureux et chrétien. Veuf, celui-ci s’était remarié avec une sainte femme qui eut un songe particulier alors qu’elle était enceinte.
Elle vit que son enfant était porté par saint Pierre devant le trône de Dieu, ce qui semblait annoncer une destinée peu commune.
Hugues étudia à Valence, fréquenta l’université et se montrait fidèlement attaché aux exemples reçus de ses parents.
Devenu chanoine de la cathédrale de Valence, il fut bientôt choisi pour accéder au siège épiscopal de Grenoble : il n’avait que vingt-sept ans.
Hugues se sentait indigne d’une telle charge, et surtout bien impréparé, mais la sainteté de sa vie le recommanda au légat du pape. Le légat le rassura et lui conféra tous les ordres sacrés jusqu’à la prêtrise.
Il fallait à cette époque restaurer la sainteté du clergé, qui s’abandonnait à toutes sortes d’égarements, notamment dans la simonie et l’incontinence. En particulier, l’archevêque de Vienne passait pour être simoniaque, ce qui fit que Hugues préféra recevoir la consécration épiscopale par le pape lui-même, Grégoire VII (v. 25 mai).
A Rome, Hugues fut assailli de doutes et pensait renoncer à être consacré ; le légat lui donna l’heureuse inspiration d’en référer au pape personnellement, et de suivre en tout les décisions du Pontife, ce qu’il fit.
Lors du sacre, la comtesse Mathilde fournit tout ce qui était nécessaire à la cérémonie, entre autres le bâton pastoral.
Arrivé dans son diocèse, Hugues crut y voir l’abomination de la désolation, devant la débauche et l’ignorance du clergé. Le jeune évêque exhorta, pria, jeûna.
Se sentant impuissant à inverser la situation, il se retira, définitivement, pensait-il, à l’abbaye de la Chaise-Dieu (1084), dont le pape le fit toutefois sortir promptement l’année suivante, avec ordre de retourner dans son diocèse. Hugues obéit humblement.
Trois ans après, Hugues vit en songe sept étoiles illuminer les montagnes de la Chartreuse, où se trouvait Dieu le Père, au-dessus d’un magnifique temple. Quelques jours après vinrent le trouver sept hommes : c’étaient Bruno de Cologne et six amis qui venaient lui demander où ils pourraient établir l’ermitage qu’ils projetaient. C’est ainsi que naquit l’Ordre de la Chartreuse, fondé par saint Bruno, avec l’appui de Hugues de Grenoble (v. 6 octobre).
A l’avenir, Hugues fréquenta souvent les pères Chartreux, chez lesquels il se comportait comme le dernier des frères et même, parfois, y prolongeait tellement son séjour, que saint Bruno devait intervenir et le «renvoyer» à son diocèse. Hugues obéissait toujours humblement.
Hugues songea à vendre ses chevaux, par pauvreté et pénitence, et à parcourir à pied son diocèse. Saint Bruno l’en dissuada, par prudence. Il obéit encore.
Il exagéra ses pénitences et ses jeûnes, qui lui causèrent des maux d’estomac et de tête jusqu’à la fin de sa vie.
Souvent les larmes lui venaient aux yeux, en entendant un passage émouvant, en recevant les fidèles à la confession, en prêchant. Ces larmes complétaient l’efficacité de sa parole, et les fidèles l’attendaient au bas de la chaire pour se confesser.
Humblement, Hugues présenta plusieurs fois sa démission aux papes, au motif de sa vieillesse et de ses maladies, mais le pape Honorius II eut la sagesse de lui répondre : Je te préfère vieux et malade pour le bien de ton peuple, à tout autre qui serait jeune et en bonne santé. Autres temps…
Quand un seigneur, nommé Guy, vint lui demander sa bénédiction, il commença par lui reprocher vertement d’avoir levé un nouvel impôt ; Guy promit de supprimer l’impôt. Hugues était d’une charité infinie, et alla jusqu’à vendre son anneau et un calice en or pour avoir de quoi soulager des pauvres en temps de disette.
Hugues mourut le vendredi 1er avril 1132, huit jours avant Pâques, qu’il alla fêter glorieusement en Paradis avec saint Pierre. Il avait presque quatre-vingts ans, et était resté dans son diocèse plus d’un demi-siècle.
Innocent II voulut le canoniser dès 1134.
La châsse qui abritait le corps de saint Hugues, fut détruite et le corps brûlé sur la place publique par les Huguenots révoltés, au 16e siècle.
Saint Hugues de Grenoble eut un neveu, également prénommé Hugues, abbé à Bonnevaux, également commémoré le 1er avril.
Hugues de Bonnevaux
† 1194
Ce ne sont pas les détails qui abondent au sujet de ce saint abbé, mais ce qu’on en sait le rendent «grand».
Il était né à Châteauneuf, neveu de l’évêque Hugues de Grenoble (v. ce même jour), et entra dans l’abbaye cistercienne de Maisières.
Il fut nommé abbé de Léoncel en 1161 ; cette abbaye avait été fondée en 1137 par Jean, moine de Cîteaux, avec des moines venus de Bonnevaux. En 1790, les derniers moines furent expulsés et l’abbatiale devint église paroissiale, ce qui la préserva de la démolition complète ; récemment, une association s’emploie à réhabiliter le bâtiment.
Ce même abbé Jean avait été le premier abbé de la nouvelle abbaye de Bonnevaux (Haute-Savoie), fondée en 1117 et Hugues en fut le sixième abbé, en 1166.
Profondément imprégné de la spiritualité de saint Bernard (v. 20 août), Hugues en écrivit la biographie, mais surtout il réussit, à force de patience et de douceur, à rapprocher l’empereur Friedrich Barbarossa du pape Alexandre III, qui se «réconcilièrent» en 1177.
Cette magnifique abbaye de Bonnevaux fonda huit «filiales», dont Léoncel et Tamié, mais fut abandonnée au moment de la Révolution ; rachetée par des notaires, elle fut vendue, détruite, réduite à une carrière de pierres, vers 1830.
Hugues de Bonnevaux mourut le 1er avril 1194, soixante-deux ans jour pour jour après son oncle Hugues de Grenoble.
Gillebrighde de Moravia
† 1245
La famille écossaise de Moravia était en réalité de Moray, le site des ancêtres de la famille, qui se dit Moireibh ou Moireabh en gaélique ; leurs terres s’étendaient à Duffus et Strabok.
L’ancêtre Alexander fut le père de Muiredach, lequel eut deux fils : Richard et Gille Brigte (auj. Gillebrighde), que nous francisons en Gilbert. Richard fut tué au cours d’une bataille contre les Scandinaves.
Gilbert fut longtemps archidiacre du diocèse de Moray ; on suppose qu’il fut nommé évêque de ce siège vers 1223, en présence du roi, qui fut sans doute à l’origine de son transfert à Caithness en 1224 : en effet, le prédécesseur de Gilbert avait été assassiné, et le roi voulait rapprocher le siège épiscopal de sa capitale pour mieux le protéger.
L’évêque cependant résidait en d’autres localités proches : Halkirk, Dornoch, Scrabster. A Dornoch, il fit édifier la nouvelle cathédrale, et y fit déposer les restes de son prédécesseur, Adam de Melrose.
Il y fit aussi édifier plusieurs maisons pour les pauvres.
On le connaissait comme un prédicateur de talent et, dit-on, il travailla beaucoup pour civiliser son diocèse.
Il mourut le 1er avril 1245 à Dornoch, où il fut enseveli. Son tombeau fut vénéré jusqu’à la Réforme, et l’on prêtait serment sur sa tombe, jusqu’en 1545.
Gillebrighde de Moravia est le dernier Ecossais canonisé (au moins officieusement) avant la Réforme.
Nuno Álvares Pereira
1360-1431
Cet illustre général portugais naquit le 24 juin 1360, à Cernache do Bonjardim (Portugal), fils illégitime de Álvaro Gonçalves Pereira, chevalier de l’ordre hospitalier de Saint-Jean de Jérusalem, et de Iria Gonçalves do Carvalhal. Un décret royal le rendit légitime, lui permettant de recevoir une éducation d’habitude réservée aux nobles.
A treize ans il était soldat. A seize ans, sur conseil de son père, il épouse Leonor de Alvim ; ils auront trois enfants, dont Beatriz, qui épousera plus tard le fils de Jean 1er, Afonso, premier duc de Bragance, souche de la dernière dynastie royale.
Nuno sera investi des titres de comte d’Arraiolos, comte de Barcelos, comte d’Ourém. On le connaîtra aussi sous le nom de Saint Connétable.
En 1383, quand meurt le roi Ferdinand 1er de Portugal, l’héritier du trône est sa fille, Béatrice, épouse de Jean 1er de Castille, mais devant ce risque d’annexion par la Castille, Nuno soutient Jean, maître de l’Ordre d’Aviz, quoiqu’il soit de naissance illégitime.
Dans deux batailles successives (Atoleiros, Aljubarrota), la Castille sera défaite par les troupes, pourtant bien inférieures, de Nuno, qui y montre tout son génie militaire, mais surtout sa confiance totale en Dieu. C’est là qu’il est fait comte d’Ourém.
Le général Nuno pouvait espérer une retraite glorieuse : il n’en fit rien. A la mort de son épouse en 1387 (il a vingt-sept ans), il préfère rester seul sans se remarier, se met au service des pauvres, construit beaucoup d’églises en l’honneur de Marie, Mère de Dieu et fonde un couvent de Carmes (1389) à Lisbonne, où lui-même devient frère convers en 1423. Il prendra le nom de Nuno de Sainte Marie.
Nuno a soixante-trois ans. Il renonce à tous ses titres, distribue ses biens aux pauvres et se livre à une humble vie toute de pénitence, avec une grande dévotion à la Mère de Dieu. Il passe des heures devant le Saint Sacrement et assiste à plusieurs messes chaque jour.
Après huit années d’austérités et de mortifications, il meurt le jour de Pâques, disent les sources, donc le 1er avril (et non le 1er novembre du Martyrologe) 1431, deux mois avant sainte Jeanne d’Arc.
La tombe de Nuno sera détruite lors du terrible tremblement de terre de Lisbonne en 1755.
Il a été béatifié en 1918, et canonisé en 2009.
John Bretton
1527-1598
John Bretton (ou Britton) était né vers 1527 à West Bretton (West Yorkshire, Angleterre).
Il appartenait à une ancienne famille de Bretton (Barnsley). C’était un fervent catholique et à cause de sa foi dut plusieurs fois être séparé de son épouse et de sa famille à cause de la persécution.
Il était désormais déjà assez âgé, lorsqu’on lui prêta des propos hostiles à la Reine ; dénoncé, accusé, condamné à mort, il subit le martyre réservé aux traîtres et fut exécuté par pendaison le 1er avril 1598.
Il fut béatifié en 1987.
Un professeur au Collège de Douai, en 1599, portait le nom de Matthew Britton, et pourrait être un de ses fils.
Zofia Czeska-Maciejewska
1584-1650
Zofia était née en 1584, à Budziszowice (Kazimierski, Pologne), troisième enfant de Mateusz et Katarzyna Lubowiecka, des parents aisés.
A seize ans, elle épousa Jan Czeski. Le couple resta sans enfants.
Devenue veuve, après six ans de mariage, elle vécut une expérience peu banale : un homme chercha à l’enlever dans la rue pour l’épouser. Ayant refusé, elle fut «relâchée» par l’homme, qui épousa alors la jeune sœur de Zofia, Anna.
N’ayant pas d’enfants à élever, et malgré son jeune âge, elle se donna aux bonnes œuvres, particulièrement en secourant les pauvres et les petites orphelines.
En 1621, avec ses propres ressources, elle ouvrit pour ces dernières la Maison de la Vierge. C’était la première école pour filles en Pologne. Elle fut approuvée dès 1627.
Puis, pour achever cette œuvre, elle fonda les Sœurs de la Présentation de la Bienheureuse Vierge Marie, vouées à l’enseignement et qui maintiennent encore aujourd’hui leur présence efficace.
Mère Zofia mourut à Cracovie le 1er avril 1650.
Peu de temps après, la congrégation fut approuvée par l’évêque de Cracovie.
Mère Zofia a été béatifiée en 2013.
Sim A-gi Barbara
1783-1801
Sim A-gi Barbara est une laïque coréenne née en 1783 à Gwangju (Gyeonggi-do, Corée S).
Elle fut enterrée vivante à Seoul en un jour non précisé d’avril 1801 et béatifiée en 2014.
Lodovico Pavoni
1784-1849
Né à Brescia le 11 septembre 1784, Lodovico (Ludovic) fut l'aîné des cinq enfants de Alessandro et Lelia Poncarali, des parents nobles et aisés, et chrétiens.
Ce fut un garçon vif, intelligent, perspicace, audacieux même.
Ordonné prêtre en 1807, il se donna à fond dans la catéchèse, fondant un nouvel Oratoire pour combler le vide créé par les anciens Oratoires, décadents. Il faut préciser que par Oratoire, on entend ici ce qui s'appela en France un patronage.
En 1812, il devint secrétaire de l'évêque, tout en restant à la tête de son Oratoire, et en 1818 il fut nommé chanoine de la cathédrale, en même temps que recteur de la basilique Saint-Barnabé.
Il fonda alors un Collège des Arts qui prendra le nom de Pieux Institut Saint-Barnabé, ouvert aux jeunes pauvres et abandonnés. Il y ajoutera une section pour les sourds-muets, et projettera plus tard aussi une Ecole Agricole.
Ce Collège va se développer en divers secteurs d'activités : instruction, typographie, calcographie, éditions, reliure, argenterie, menuiserie, cordonnerie, ferronnerie. Sa typographie fut la première école du genre en Italie et sera à l'origine des actuelles éditions Àncora.
De plus, il eut l'intuition de rénover les “lois” du travail, sachant récompenser ses “ouvriers” par un salaire régulier, organisant une couverture pour la maladie, évitant tout licenciement sauf pour faute grave.
En 1836 le Collège vint en aide aux nombreuses victimes du choléra, et cette assistance sera officiellement reconnue par la municipalité de Brescia en séance extraordinaire.
En 1844 il fut décoré Chevalier de la Couronne de Fer par l'Empereur d'Autriche.
Enfin il fonda en 1847 la Congrégation des Fils de Marie Immaculée (qui prendront le nom de Pavoniani), voués au travail parmi les ouvriers, une initiative nouvelle et audacieuse pour l'époque, et qui sera critiquée âprement dans les milieux sociaux, mais aussi à l'intérieur de l'Eglise, ce qui n'est jamais rare de la part des ecclésiastiques devant toute nouveauté. D'une part les prêtres prêteront leur assistance sacerdotale et spirituelle, d'autre part les enseignants seront eux aussi consacrés, tout en restant laïcs.
Cette même année 1847, il donna officiellement sa démission de Chanoine et fit les voeux dans son Institut, le 8 décembre.
Don Lodovico Pavoni mourut le 1er avril 1849, dimanche des Rameaux, à Saiano (Brescia), où il s'efforçait de conduire en sûreté ses garçons, pendant l'insurrection de Brescia contre les Autrichiens.
Le miracle retenu pour la béatification fut, en 1909, la guérison immédiate, complète et durable d'une femme atteinte de tuberculose abdominale : vomissements répétés, fièvre très forte, délire continu, complications au niveau des méninges, état quasi comateux. Après avoir déposé un soir une relique de Lodovico Pavoni sous l'oreiller de la malade, celle-ci se réveilla le lendemain matin sans fièvre, demandant à manger, et sans aucune séquelle de son mal. Elle put se marier et devenir enseignante.
Lodovico Pavoni a été béatifié en 2002, et canonisé en 2016.
Yun Bong-mun Iosephus
1852-1888
Yun Bong-mun Iosephus (ou Petrus) est un laïc coréen né en 1852 à Gyeongju (Gyeongsang-do, Corée S).
Il fut pendu à Jinju (Gyeongsang-do) le 1er avril 1888 et béatifié en 2014.
Karl 1er
1887-1922
L’empereur Karl ( Charles) était le Premier de ce nom pour l’Autriche, le quatrième pour la Hongrie, le troisième pour la Bohême.
Karl Franz Joseph Ludwig Hubert Georg Maria (sic !) naquit le 17 août 1887 au château de Persenbeug en Basse-Autriche.
Il était le fils aîné de l’archiduc Otto et de Maria Josepha Luise de Saxe et le petit-neveu de l’empereur Franz Joseph Ier. C’est le frère aîné de Otto, Franz Ferdinand, qui était héritier de la couronne impériale et qui fut assassiné à Sarajevo en 1914.
Karl eut des précepteurs qui l’instruisaient à la cour, puis il fréquenta le lycée à Vienne.
En 1903 il est nommé Lieutenant du régiment “Archiduc Otto”, puis reçoit sa formation militaire.
A la mort de Otto en 1906, le frère de celui-ci Franz-Ferdinand héritait de la couronne, mais ayant contracté un mariage “morganatique”, ses enfants étaient exclus de la succession, et à la mort de l’empereur Franz Joseph, la couronne passerait automatiquement à Karl, ce qui eut lieu en 1916.
Il épouse en 1911 Zita de Bourbon-Parme, avec laquelle il aura huit enfants, maintenant tous décédés entre les années 1971 et 2011 (dont sont actuellement issus trente-trois petits-enfants). Lui et son épouse prendront plusieurs fois ensemble des décisions gouvernementales importantes.
A l’intérieur, il engagea des réformes (qui subsistent encore) en politique sociale et sanitaire. Il chercha à venir en aide auprès de ceux que la guerre avait ruinés. Contrairement à bien d’autres dirigeants, il visita souvent ses soldats jusque sur le front.
A l’extérieur il aurait voulu mettre un terme rapide à cette horrible Guerre mondiale, quitte à se désolidariser de l’Allemagne, mais il voulait aussi préserver l’intégrité de son pays. Par ailleurs sa tentative d’intervention par l’intermédiaire de son beau-frère Sixte de Bourbon-Parme échoua devant le mépris de l’ ”Entente”.
Dans son désir d’arriver à la paix, Karl proposa à l’Allemagne d’écouter les appels du pape Benoît XV, de renoncer à la guerre totale sous-marine, au bombardement de civils, à l’usage de gaz contre les ennemis.
L’auteur français Anatole France écrivit de lui : L’empereur Charles est l’unique homme décent qui sortit de la guerre dans une position de leader : c’était un saint, et personne ne l’a écouté. Lui, il voulait la paix sincèrement, et c’est pourquoi le monde entier l’a dédaigné. C’était une chance merveilleuse, qui fut perdue (retraduit de l’anglais).
Après l’armistice et la fin de la guerre, les différentes ethnies de l’empire austro-hongrois, soutenues par les pays de l’Entente, réclamèrent leur indépendance. Karl se vit contraint de se retirer, d’abord en Suisse, puis sur la Mer Noire, enfin sur l’île de Madère, fin 1921. Les forces de l’Entente espéraient par là l’empêcher définitivement de retourner dans son pays, tandis qu’en Autriche même, la “Loi Habsburg” interdisait tout retour à l’empereur, à sa famille et à sa descendance.
Une tentative de restauration échoua en Hongrie, d’où l’on exclut aussi la famille Habsburg.
Karl et son épouse Zita, avec leurs enfants, purent survivre quelque temps. On leur vola même leurs derniers bijoux, seules richesses personnelles, et des banquiers amis mirent à leur disposition une habitation.
En mars 1922, Karl prit froid. Par économie, on n’appela le médecin que deux semaines plus tard, mais ce dernier diagnostiqua une forte inflammation des poumons. Karl mourait le 1er avril, même pas âgé de trente-cinq ans, dans les bras de son épouse Zita qui attendait son huitième enfant. Ses derniers mots furent : …Que ta volonté soit faite… Oui… Oui… Comme tu veux… Jésus !
Ce saint homme d’état a été béatifié en 2004, après la reconnaissance de la miraculeuse guérison d’une religieuse brésilienne.
En 2008, un autre miracle a été reconnu, concernant une Américaine de Floride, baptiste, qui se convertit depuis au catholicisme. Ce miracle a ouvert la voie à la canonisation de l’empereur autrichien.
Le bienheureux Karl d’Autriche est inscrit au 1er avril dans le Martyrologe.
Anacleto Gonzáles Flores
1888-1927
Né le 13 juillet 1888 à Tepatitlán (Jalisco, Mexique), Anacleto était le deuxième des douze enfants (trois filles et neuf garçons) de Valentín González Sánchez et María Flores Navarro.
Baptisé le 14 juillet, il reçut les noms de José Anacleto, mais est plus connu sous le simple appellatif de Anacleto.
Avec tant de bouches à nourrir, les parents ne furent pas spécialement riches ; le papa était un petit tailleur et enseigna à Anacleto le métier. Il lui enseigna surtout la persévérance dans le travail, l’amour de la Patrie, et l’amour des lettres : il lui fit apprendre par-cœur un long discours à déclamer un 15 septembre.
Anacleto aimait la musique et fit partie de l’harmonie municipale. Il ne se séparait pas de sa guitare, avec laquelle il se consolait de ses tristesses.
En grandissant, il montra ses qualités de chef. Son caractère noble imposait le respect, et il n’aimait pas voir quelqu’un profiter de la faiblesse des autres.
A dix-sept ans, ayant entendu une homélie, il se sentit appelé à utiliser ses dons d’orateur pour la cause de Dieu. Il commença à réunir les gamins du village pour leur faire le catéchisme.
Le curé pensa orienter Anacleto vers le sacerdoce et le fit entrer au séminaire de San Juan de los Lagos, en lui payant sa pension.
Le jeune homme étudia avec ténacité, au point qu’après quelques mois, il pouvait tenir une conversation en latin et même qu’il pouvait remplacer son professeur quand il s’absentait. De là lui vint le surnom de Maître ou Maître Cleto que lui donnèrent ses compagnons.
Il passa au séminaire de Guadalajara pour la théologie, mais il se rendit compte que ce n’était finalement pas sa voie.
En 1913, il s’inscrivit à l’Ecole de Droit de Guadalajara ; plusieurs fois, il dut interrompre ses études, en particulier pour des motifs économiques ; mais il finit par recevoir le diplôme, en 1922.
A l’Ecole de Jurisprudence, il communiqua à ses compagnons la force de la parole, la rigueur du raisonnement, le courage de regarder en face.
En 1914, Guadalajara fut envahie par les troupes qui saccagèrent la ville. Quand sortirent les lois contre l’Eglise, il fallut fermer les collèges privés et Anacleto vint se réfugier chez son frère Severiano, qui tenait un petit commerce d’alimentation à Concepción de Buenos Aires (Jalisco).
Au bout de quelques mois, profitant d’un moment de trêve au milieu de cette furie antireligieuse, il revint à Guadalajara pour reprendre ses activités de professeur et d’avocat. Il rencontrait ses amis, s’amusait avec eux : une seule fois, il se sentit ivre, et se retira dans un coin, où ses camarades le retrouvèrent à genoux, les bras en croix.
En 1916, il fit partie de l’Association Catholique de la Jeunesse Mexicaine (ACJM), fondée par un Jésuite. Les membres de cette association s’engageaient à faire le catéchisme, visiter les prisonniers, participer à des conférences, vaquer à des occupations saines. Au début d’un jeu, Anacleto répétait : Tu es libre de faire ce que tu veux avec qui tu veux, mais pas le péché ni avec les malfaiteurs.
Ils furent ainsi un bon nombre de camarades qui étaient enthousiasmés pour instaurer le Règne de Dieu. Un de ses meilleurs amis fut Miguel Gómez Loza, futur martyr (v. 21 mars).
Anacleto donnait des conférences, écrivait des articles pour réfuter les idées révolutionnaires de la Constitution de 1917. Il cherchait par tous les moyens à réveiller les esprits, déplorant le manque d’organisation : Des jeunes, il y en a ; mais on n’a pas la jeunesse, disait-il souvent.
Surtout, il nourrissait sa vie intérieure par la Messe quotidienne, par la prière ; il entra dans le Tiers-Ordre franciscain et rencontrait l’archevêque de Guadalajara pour en recevoir les conseils.
En 1918, il y eut des affrontements dans Guadalajara. Anacleto prit la défense des droits du peuple et ne lâcha pas prise, jusqu’à obtenir l’annulation de certains décrets.
C’est dans ces conditions qu’il put élaborer la Philosophie de la Résistance, très proche de celle du Mahatma Gandhi qui, à l’époque, avait une cinquantaine d’années.
Il n’en fallait pas tant pour être repéré par les autorités civiles : en juillet 1919, Anacleto fut mis quelque temps en prison, avec ses compagnons.
En 1922, il participa activement au Premier Congrès National Ouvrier Catholique, qui eut lieu à Guadalajara.
En novembre de la même année, il épousa María Concepción Guerrero Flores, devant l’archevêque.
En 1924, le gouverneur demanda au vicaire général, en l’absence de l’archevêque, de désigner quelles seraient les six églises qui resteraient ouvertes à Guadalajara. Ce prêtre avait publié un catéchisme, un excellent manuel traitant de la foi, de la morale et de la formation culturelle des fidèles. Sa réponse au gouverneur fut nette : Ou toutes sont ouvertes, ou toutes sont fermées. Le gouverneur fit fermer le séminaire, l’orphelinat et l’hôpital, qui étaient des œuvres de l’Eglise.
Les catholiques ne manquèrent pas de réagir. Anacleto se trouva unanimement à la tête de l’Union Populaire, où le mot d’ordre fut d’abord : catéchisme, école, presse. Anacleto fonda le journal Gladium (Epée), organe officiel du mouvement, où il collabora comme auteur, comme éditeur et comme distributeur, aux portes des églises et dans les maisons.
L’évêque appuya fortement ces initiatives. Le pape en eut écho et décora Anacleto de la Croix Pro Ecclesia et Pontifice (Pour l’Eglise et pour le Pape).
Anacleto s’opposait fermement à la lutte armée. Ses prises de positions dans Gladium allaient contre celles de la Ligue Nationale pour la Défense de la Liberté Religieuse, fondée à Mexico, et qui prônait l’usage des armes. Son «épée» à lui, c’était la force morale.
A partir de juillet 1926, quand fut interdite toute manifestation de culte public, Anacleto conçut le projet de soulever le pays entier et de le mettre dans un tel état de crise économique, que le gouvernement serait obligé à faire marche arrière.
A la fin de 1926 cependant, ceux de la Ligue Nationale pour la Défense de la Liberté Religieuse proposèrent à Anacleto ou de s’allier avec eux, ou de rester en-dehors. Il se trouvait entre l’enclume et le marteau. Sa position fut courageuse et claire : Je sais que va commencer notre calvaire. Si quelqu’un de vous me demande comment nous allons signer notre accord, je lui dirai deux mots : Ton Sang !
Il resta caché, écrivant, soutenant, encourageant, mais surtout en se préparant au martyre.
Au matin du 1er avril 1927, les miliciens se présentèrent chez les Vargas González, où ils pensaient trouver Anacleto et ses collaborateurs ; seul Anacleto était là, aussi arrêtèrent-ils toute la famille. Dans la journée, ils relâchèrent la maman, sa fille et le plus jeune des garçons (Florentino). Mais ils gardèrent Jorge et Ramón, ainsi que Luis Padilla Gómez.
Ils torturèrent Anacleto de la manière la plus douloureuse : on le suspendit par les poignets jusqu’à ce que les doigts fussent désarticulés, on le battit sans pitié, on lui brisa les mâchoires et les dents avec une crosse de fusil, on lui écorcha la plante des pieds et les paumes des mains avec un couteau ; son sang coulait sur le ciment, et Anacleto écrivit de son sang : Vive le Christ Roi. Je meurs pour le Christ.
On cherchait à lui arracher l’indication des noms et des domiciles. Quand on lui demanda de dire qui étaient ceux qui s’opposaient aux lois du seigneur général Calles (Signor General Calles), il répondit : Il n’y a qu’un Seigneur, au ciel et sur terre. J’ignore ce que vous me demandez.
Tandis qu’ils le conduisaient avec les trois autres au mur de l’exécution, Anacleto parlait aux soldats (qui restaient silencieux) de l’existence de Dieu, de l’immortalité de l’âme et de la légitimité de l’Eglise.
Les quatre hommes récitèrent l’acte de contrition. Une décharge tomba sur les frères Vargas ; Luis Padilla fut seulement blessé et tomba à genoux dans son sang, en priant, avant d’expirer.
Anacleto se dirigea vers le général pour lui dire qu’il lui pardonnait de tout son cœur et que, quand viendrait son heure, il y aurait pour lui devant le Créateur, un intercesseur, lui, Anacleto González Flores.
Les soldats n’osèrent pas tirer sur Anacleto ; aussi le général fit un signe au capitaine, qui alors lui enfonça un formidable coup de poing dans la poitrine. Anacleto s’effondra et alors les soldats tirèrent. Anacleto eut encore la force de se reprendre et de dire à voix haute : Pour la seconde fois en Amérique, on entend ce cri : Moi, je meurs, mais Dieu ne meurt pas. Vive le Christ Roi ! (La «première fois» fut le 6 août 1875, lors de l’assassinat de Gabriel García Moreno, président de l’Equateur).
(Une autre version affirme qu’on lui assena un coup de baïonnette dans le dos).
En ce vendredi 1er avril 1927, à trois heures de l’après-midi, les quatre corps des Martyrs étaient là, dans la cour de la caserne.
Le lendemain matin, défiant les policiers, des milliers de personnes défilèrent en chantant le Christ Roi et Notre-Dame de Guadalupe. Il y eut bien dix-mille personnes qui assistèrent aux funérailles.
Anacleto González Flores, avec les frères Vargas et Luis Padilla ainsi que quatre autres de leurs Compagnons, furent béatifiés en 2005.
Luis Padilla Gómez
1899-1927
Né le 9 décembre 1899 à Guadalajara, de Dionisio Padilla et Mercedes Gómez, Luis fut le quatrième et dernier enfant de cette famille chrétienne. Son frère jumeau mourut. Il reçut au baptême les noms de José Dionisio Luis.
Les trois enfants furent bientôt orphelins de leur père.
Luis étudia dans un collège privé tenu par Tomás Fregoso. Il fit la Première communion en 1908. Puis fréquenta l’Institution Saint-Joseph des pères Jésuites. Il aimait beaucoup le théâtre, mais en conserva un souvenir amer, négatif, car selon lui, ça l’avait empêché, tout jeune, de s’envoler vers les cimes. Il détruisit son carnet de notes où il avait écrit ses premiers essais littéraires, et en commença un autre qu’il intitula : Souvenirs et Impressions.
En 1915, il fit partie de la Congrégation Mariale. En 1916, il entra au Grand séminaire de Guadalajara, où il resta cinq années. Mais, on va le voir, le scrupule lui fit croire qu’il n’avait pas la vocation. Il avait dans son caractère de réelles ascensions mystiques, mais aussi des angoisses persistantes.
On a de lui ces invocations à la Vierge Marie :
Marie, avant l’existence du monde, Tu étais déjà dans l’esprit du Très-Haut, pure comme la lune. Toi, sans tache dans ta conception, tu as vaincu le dragon. Toi, en ta naissance, tu es l’espérance du Messie. Toi, au temple, tu es le modèle de la vie cachée. Toi, dans l’Incarnation, tu es le trait d’union entre l’humanité divinisée et Dieu humanisé. Toi, à Bethléem, tu es le premier autel de l’Enfant Dieu. Toi, sur le calvaire, tu es le grand prêtre qui offres ton propre Fils Divin. Toi, au ciel, tu es notre unique espérance. Toi, la toujours Mère !
Toute la vie spirituelle de Luis passait entre ces deux pôles : Marie et la méditation eucharistique.
En 1920, après ses brillantes études philosophiques, les supérieurs lui proposèrent d’aller étudier la théologie à Rome. Il refusa, se sentant encore incertain sur sa vocation.
Déjà membre de l’Association Catholique de la Jeunesse Mexicaine (ACJM), il se donna alors à fond pour la promouvoir, en donnant des conférences. Il s’inscrivit aussi à l’Unión Popular, formant les jeunes qui voulaient y entrer.
Si son ami Anacleto Gonzáles Flores savait écrire dans les journaux et tenir des discours en public, lui préférait donner des leçons de littérature au séminaire et restait réservé.
En 1926, il lui revint le désir d’être prêtre, mais ce fut l’année où furent fermées les églises et les séminaristes étaient tous disséminés là où il était possible de se cacher. Il sentit arriver le moment «solennel» ; il se destinait à verser tout son sang pour Dieu.
Début 1927, la guerre civile des cristeros s’intensifie. Le 4 février, Luis est à Ameca (Jalisco) pour les soutenir. Début mars, il rejoint Anacleto à Guadalajara.
Le 31 mars, Luis se retira comme d’habitude dans sa chambre. A deux heures du matin, la maison fut encerclée par la police au commandement du général Ferreira. Ils entrèrent dans la maison et arrêtèrent Luis, sa maman Mercedes et sa sœur María-de-la-Luz (ou María-Luisa).
Les dames furent libérées tout de suite. Luis fut emmené avec Anacleto et les frères Vargas. Le général tenait à exécuter scrupuleusement les ordres reçus car, pensait-il, il y allait de sa carrière.
Luis voulait se confesser. Anacleto lui répondit sur un ton de chef : Ce n’est pas le moment de se confesser. Demande pardon, et pardonne. Celui qui nous attend, c’est un Père, pas un juge. C’est ton propre sang qui te purifiera.
Les quatre amis s’agenouillèrent les bras en croix, et dirent à haute voix l’acte de contrition, qui s’arrêta quand les coups de feu partirent.
Luis avait vingt-sept ans. On pourra lire quelques autres détails dans la notice sur Anacleto Gonzáles Flores.
C’était le vendredi 1er avril 1927. Ces Martyrs furent béatifiés en 2005.
Jorge Ramón Vargas González
1899-1927
Ramón Vicente Vargas González
1905-1927
La famille Vargas González s’était installée à Guadalajara. Le docteur Antonio Vargas et son épouse Elvira González eurent onze enfants, six garçons et cinq filles. C’est à la dernière, Marìa Luisa, que nous devons tant de détails précis sur les événements qu’on va raconter.
En août 1926, le docteur se proposa de soigner gratuitement les blessés qui avaient défendu le sanctuaire de Notre-Dame de Guadalupe. A la maison, Madame Vargas tenait une petite pharmacie. Ils habitaient rue Mezquitán, n° 405, et donnèrent l’hospitalité aux prêtres et aux séminaristes qui fuyaient de-ci de-là, poursuivis par la police.
Jorge Ramón était né le 28 septembre 1899 à Ahualulco de Mercado (Jalisco). Après l’université, il travaillait dans la Compagnie Hydroélectrique.
Ramón Vicente était né le 22 janvier 1905, également à Ahualulco de Mercado. Il était arrivé à la quatrième année de médecine. Roux de cheveux, on l’appelait le Colorado.
Les deux garçons, ainsi que leur jeune frère Florentino, appartenaient à l’Association Catholique de la Jeunesse Mexicaine (ACJM), et étaient très amis de Anacleto González.
Un jour, le père Lino Aguirre, futur évêque de Culiacán (Sinaloa), se présenta. Jorge partagea avec lui sa chambre et l’assista dans son apostolat. Un beau jour, il lui dit : Ce n’est pas bon d’aller comme ça tout seul, il pourrait vous arriver quelque chose. Désormais, je serai votre garde du corps. Et depuis, il rentrait vite de son travail, se changeait et suivait à bicyclette le père Lino.
Un soir, c’est le propre chef des ACJM qui vint frapper à la porte, Anacleto González Flores. La famille ne pouvait pas ne pas le recevoir, mais c’était une responsabilité énorme, car Anacleto était recherché partout.
Un jour, Anacleto proposa à Ramón d’aller soigner les blessés. Ramón refusa : il était homme de paix, ces histoires ne l’intéressaient pas, il pensait à son métier ; bander la tête, les jambes, les bras, oui, mais se trouver au milieu de la bagarre, non, jamais !
Au soir du 31 mars 1927, Ramón eut un étrange pressentiment et eut envie de ne pas rentrer à la maison, mais en pensant à l’inquiétude de sa mère et de ses sœurs, il rentra vers onze heures du soir.
On frappa à cinq heures du matin : On voudrait un médicament ! Madame Elvira réveilla Ramón; qui n’avait vraiment pas envie de se lever. Mais la police escalada les murs, envahit la terrasse. Ouvrez, au nom de la loi ! Madame Elvira dit aux siens : On est découvert, on va tous y passer.
Florentino entr’ouvre la porte et demande à voir l’ordre d’arrêt. Pour toute réponse, un pistolet. La police envahit la maison. Anacleto, mal réveillé, se met un pullover le devant derrière, il tente de fuir par la terrasse, mais elle est bloquée par les policiers ; il se cache sous une table. On l’interpelle : C’est vous, Anacleto González Flores ? Anacleto a retrouvé son calme, il répond Oui, et lance un regard d’excuses à Madame Elvira, car à cause de lui, toute la maison est menacée. Madame Elvira le rassure d’un geste : C’était prévu !
Les policiers firent monter dans deux camions Anacleto et les trois frères Vargas d’une part, tandis qu’ils emmenaient leur mère et leurs sœurs dans l’autre. Anacleto tenta de faire libérer les garçons, qui n’avaient rien à se reprocher, mais ce fut en vain.
Ramón aurait pu s’échapper car il avait réussi à se glisser le long de la maison sans être vu, mais, comme il le dit à son jeune frère Florentino, il ne voulait pas s’enfuir alors que sa mère et ses sœurs étaient prisonnières.
Madame Elvira prit congé de ses fils : Mes enfants, au revoir, au Ciel !
Anacleto, Jorge et Ramón retrouvèrent au poste Luis Padilla, de même que Madame Vargas se retrouva avec Madame Padilla.
Interrogés, les hommes ne révélèrent aucun nom de personnes ni de lieux. Par bonheur, Anacleto avait eu le temps de déchirer en mille morceaux quelques papiers.
Après les douloureuses mais inutiles tortures, le général organisa un semblant de jugement : les hommes furent condamnés à mort pour entente avec les rebelles. Croyant Florentino encore mineur, ils le relâchèrent ; puis les quatre condamnés furent conduits au mur d’exécution, où ils furent fusillés vers trois heures de l’après-midi de ce vendredi 1er avril 1927.
Les femmes furent libérées vers cinq heures du soir ; elles ne savaient encore rien des Martyrs. Elles crurent pouvoir les apercevoir encore dans le train de Mexico, en vain. Puis un cousin vint leur annoncer ce qui s’était passé.
Quand Madame Elvira apprit la mort de ses fils, sa réaction fut toute chrétienne : Je m’y attendais. Je les ai offerts à Notre Seigneur. Maintenant ils sont au ciel. Préparons-nous à les recevoir comme martyrs. Et, reprenant une parente qui pleurait : Rappelle-toi que notre mission est de conduire les enfants au ciel, et moi, j’en ai déjà trois !
Les corps furent remis à la famille à huit heures du soir. Mais il manquait Florentino… On le crut enterré sur place. Mais il revint vers dix heures du soir. La maman lui dit : Ah, mon fils, tu n’as pas reçu la couronne du martyre ! Il faut que tu sois bien meilleur pour la mériter !
Comme on l’a dit à propos de Anacleto González Flores, tous ces Martyrs ont leur dies natalis au 1er avril et furent béatifiés en 2005.
Giuseppe Girotti
1905-1945
Giuseppe naquit le 19 juillet 1905 à Alba (Cuneo, Piémont, Italie NO), d’une famille toute simple. Il eut deux jeunes frères, Giovanni et Michele. Ses camarades l’appelaient Beppe.
Beppe allait chaque jour à la messe, et savait y convier ses amis. Il leur montrait comment servir la messe. Quelquefois, il savait être «sévère» quand d’autres chenapans s’en prenaient aux plus jeunes. Il devint ainsi le chef Beppe.
Après avoir fréquenté le collège dominicain de Chieri, il entra au noviciat de cet Ordre et fit la profession en 1923 à La Quercia (Viterbo, Italie C).
Ordonné prêtre en 1930, après de brillantes études à Chieri, il fut reçu docteur en théologie à Turin, avant de gagner l’Angelicum de Rome, puis l’Ecole Biblique de Jérusalem, où il fut élève du père Lagrange. Il reçut ainsi le titre de Prolita in Sacra Scriptura (expert en Ecriture Sainte).
De ses études et de sa présence en Israël, il conservera une profonde amitié pour les Juifs, qu’il appellera porteurs de la Parole de Dieu ou encore Frères aînés.
Il enseignera ensuite au séminaire dominicain de Turin et publiera des commentaires sur la Sainte Ecriture, appréciés par le Saint-Siège.
Une de ses positions très arrêtées était de soutenir qu’il n’y avait qu’un seul et unique prophète Isaïe, contre ceux qui prétendaient que, selon la différence de style, on pouvait en supposer trois.
Mais une fine dose d’humorisme et d’anticonformisme le rendit suspect autant devant les autorités fascistes qu’ecclésiastiques de l’époque : soupçonné de modernisme, il fut suspendu de ses activités et relégué au couvent dominicain de Turin, avec charge d’enseigner seulement chez les Missionnaires de Notre-Dame de la Consolation. Dès qu’il avait un moment, il visitait les vieillards de l’hospice voisin, qu’il écoutait et confessait en parlant le piémontais.
A partir de 1943, le père Girotti se lança dans une discrète, et même secrète, mais intense activité au profit des Juifs, pour lesquels il trouvera où les dissimuler, et procurera divers papiers de fausse identité.
Trahi par un faux «partisan», il fut arrêté le 29 août 1944 et mis en prison à Turin. Il fut ensuite transféré à Milan, puis au lager de Gries (Bolzano), et de là à Dachau le 5 octobre 1944.
Dans la baraque 26, prévue pour cent quatre-vingts détenus, se trouvaient un millier d’ecclésiastiques. Le matin, très tôt, un prêtre célébrait la messe pour donner l’Eucharistie aux autres. Le père Girotti célébra la Messe pour la dernière fois le 19 mars 1945, jour de la fête de saint Joseph. Il prit le typhus et fut admis à ce qu’on appelait l’infirmerie.
En réalité, depuis décembre 1944, il maigrissait, souffrait de douleurs «rhumatismales» et ses jambes enflaient : on lui diagnostiqua un carcinome.
Le jour de Pâques, 1er avril 1945, il mourut, probablement «aidé» en cela par quelque injection d’essence, comme c’était fréquent. Il n’avait pas quarante ans.
Le four crématoire ne fonctionnait plus. Giuseppe fut enseveli dans un tas de deux-cents cadavres.
En 1995, il a été nommé Juste parmi les nations par l’Etat d’Israël, avec inscription de son nom au monument Yad Vashem de Jérusalem.
Le père Giuseppe Girotti a été béatifié en 2013.
Marin Shkurti
1933-1969
Marin Shkurti naquit le 1er octobre 1933 à Samrish (Dajç-Bregu i Bunës, Shkodër, Albanie).
Après l’école primaire de Dajç, il prit des leçons auprès de prêtres : son curé Kolec Prennushi, Dedë Malaj (v. 12 mai), Pjetër Gruda, car il n’y avait évidemment pas de séminaires dans ce pays terrorisé par la dictarure communiste depuis 1944.
De Kolec Prennushi, Marin raconta à Dedë Malaj : L’abbé Kolec, avant de mourir, m’a dit : Marin, les villages sont sans prêtres. Dedë Malaj lui demanda : Mais si toi, tu es arrêté et torturé ? Marin répondit qu’il n’avait pas peur, et ajouta : La force de Christ est plus grande que celle du Diable. Il fut plus tard rapporté que Dedë Malaj avait vraiment inculqué sa propre force d’âme à Marin.
En 1961, Marin put tout de même être ordonné prêtre dans la cathédrale de Shkodër et célébrer sa Première Messe le 8 décembre dans la même cathédrale.
Dans les années soixante en effet, le gouvernement communiste albanais chercha à gagner à sa cause le clergé, en lui proposant de se séparer de Rome et de créer une église nationale. Cette proposition pouvait donner un semblant de liberté au clergé, tout en le muselant ; le clergé put profiter de cette «liberté», mais ne céda jamais quant à l’attachement fidèle à Rome.
Marin accomplit tout ce qui lui fut possible comme apostolat, dans ces difficiles circonstances, célébrant la Messe et administrant les Sacrements en cachette.
La famille se trouvant alors en danger, Marin et ses proches cherchèrent à se réfugier en Yougoslavie, mais ils furent dénoncés et arrêtés, le 14 novembre 1968. Trois jours plus tard, on les livrait aux autorités de l’Albanie.
Arrêtés, malmenés et torturés, ils furent condamnés à de dures peines de prison et de travaux forcés. Marin Shkurti fut condamné à mort comme ennemi du peuple et pour trahison envers la Patrie. Après l’annonce de la sentence, il proclama : Je suis condamné comme prêtre et je suis heureux de mourir pour ma foi en Christ… Je n’ai aucune angoisse… Vous croyez, vous, qu’avec cette «révolution» vous pouvez vaincre notre foi catholique, mais n’oubliez pas que l’Eglise puise de nouvelles forces dans le sang que nous versons. L’Eglise que vous détruisez maintenant, reprendra vie.
Et devant le peloton d’exécution : Vous me fusillez uniquement parce que je suis prêtre. Je suis innocent. Vive la foi en Christ. Vive l’Albanie.
Il fut abattu le 1er avril 1969 à Shkodër.
Marin Shkurti fut béatifié en 2016 et sera inscrit au Martyrologe le 1er avril.