Leobinus de Chartres
† 555
On a le bonheur de disposer d’une Vita de Leobinus, très célèbre, qui ne contient «pas trop d’invraisemblances» (!).
Leobinus (Lubin) était originaire du Poitou.
Son père lui confia la garde des troupeaux ; mais Leobinus demanda à un moine de lui écrire les lettres de l’alphabet sur la ceinture, ce que voyant, son père lui offrit un véritable abécédaire.
Leobinus entra très jeune dans un monastère : il voulait s’instruire.
Un diacre se permit de lui donner trois «conseils», assez étranges ; qu’on en juge : ne pas se mettre au service d’un évêque, refuser toute direction d’église, ne pas entrer dans un petit monastère. Ce diacre avait dû vivre quelque épisode difficile avec un prélat… Avoir la responsabilité d’une église est un gros fardeau, sans doute, dont le peuple de Dieu a besoin pour être conduit sur le chemin de la sainteté, mais là encore, notre diacre avait dû remarquer quelles difficultés existent parfois entre curés jaloux… Quant au petit monastère, on verra que c’est justement ce que préconisera Teresa de Ávila…
Leobinus parcourra plusieurs étapes : d’abord auprès d’un certain ermite Avitus dans le Perche, Micy pendant le temps d’un noviciat, Lérins (mais dont il fut dissuadé par un moine qui lui parla de sa décadence), Javols (auprès de s.Hilaire, v. 13 janvier), Lyon (monastère de l’Ile-Barbe). Tous ces déplacements s’expliquent par le désir intense de Leobinus d’apprendre et de vraiment trouver un maître.
Le séjour à Lyon s’acheva au moment d’une invasion des Francs. Leobinus fut lié par des soldats, plongé plusieurs fois dans un trou et laissé là évanoui.
Avec deux compagnons, il retourna auprès d’Avitus, qui le nomma alors cellérier. A la mort d’Avitus, il se retira dans une solitude près de Charbonnières, pendant cinq ans.
C’est alors que l’évêque de Chartres conféra à Lubin le diaconat et le nomma abbé au monastère de Brou, avant-même de l’ordonner prêtre.
Le même évêque lui confia une mission auprès de s.Césaire d’Arles (v. 27 août). Là, Leobinus osa encore une fois parler d’aller à Lérins, mais Césaire le gronda sévèrement en lui reprochant de vouloir abandonner son poste : Leobinus rentra à Brou. Son abbatiat dura en tout douze années. Pendant cette période, Leobinus souffrit d’un douloureux cancer au nez, qui lui déforma les traits.
A la mort de l’évêque de Chartres, Ethaire, on nomma Leobinus pour lui succéder. Seuls quelques évêques objectaient les traces malheureuses de son cancer. Mais c’était surtout sans compter sur son humilité ! Aussi on usa d’un stratagème : on lui demanda seulement d’accompagner «le» moine qu’il jugerait le plus digne de la consécration épiscopale. Innocemment, Leobinus accepta de bon gré la proposition et… quand il arriva à Chartres, on lui annonça que c’était lui, et personne d’autre, qu’on désirait, et que d’ailleurs un moine en avait rêvé la nuit précédente.
Une fois évêque, Leobinus ne fit que des miracles. Il suffisait de toucher son vêtement pour obtenir la guérison. Un des heureux bénéficiaires fut le prêtre Caletrix ou Caletricus, futur successeur de Leobinus sur le même siège (v. 4 septembre).
La maladie rongea Leobinus pendant sept années encore. Leobinus mourut un 14 mars d’une année qu’on peut situer entre 552 et 567, uniques dates connues où, en 552, Leobinus soussigna le concile de Paris, et, en 567, Caletricus soussigna celui de Tours.
Le culte de Leobinus se développa rapidement ; il est considéré à l’égal d’un fondateur d’Eglise et modèle d’évêques. Une verrière de la cathédrale de Chartres retrace les épisodes de sa vie et de ses miracles.
Les reliques de s.Leobinus furent profanées par les Huguenots au 16e siècle, et son chef disparut lors de la Révolution.
Saint Leobinus est commémoré le 14 mars dans le Martyrologe Romain.