4e dimanche de l’Avent - B
Pour ce quatrième et dernier dimanche de l’Avent, si proche de la fête de Noël, l’Eglise propose à notre méditation une des prophéties annonçant la naissance du Christ, et un évangile de l’enfance du Christ, en l’occurence, cette année, le récit de l’Annonciation.
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Qu’il est impressionnant de penser que Nathan vint annoncer à David cette bienheureuse perspective de la Maison de David, de ce Trône éternel, environ dix siècles - mille ans, avant la naissance du Sauveur !
Nathan lui-même n’en avait pas eu l'intuition, puisque dans un premier temps, il répond à David qu'il peut faire tout ce qu'il a l'intention de faire, en l'occurence, construire un Temple magnifique pour abriter l'Arche d'Alliance du Seigneur.
Dieu "corrige" donc le projet de Nathan et de David : ce n'est pas David qui construira le Temple (ce sera d’ailleurs son fils Salomon), mais Dieu construira Lui-même le vrai temple, cette immense famille : le Christ viendra, pour fonder l’Eglise, ce Temple vivant où pourront entrer toutes les nations. David sera à jamais la souche de la lignée du Sauveur : un Nom exceptionnel, une stabilité à toute épreuve, un peuple désormais tranquille, et surtout une descendance royale stable pour toujours.
Il n’est pas possible que celui qui lit avec bonne foi les paroles de cette prophétie, ne voie tout d’abord qu’elle regarde le Salomon spirituel fondant l’Eglise spirituelle, l’Eglise qui durera autant que les siècles, plutôt que le Salomon typique construisant le temple de Jérusalem, temple périssable et à jamais ruiné.
On se souviendra que Salomon signifie prince de la paix, une des qualifications typiques du Messie.
Le Salomon historique, qui a commencé à régner du vivant de son père, ne peut pas être, dans l’exacte application, celui que Dieu a promis à David de lui susciter après qu’il aura accompli ses jours et quand il reposera déjà avec ses pères ; il ne peut pas être celui dont le règne doit être affermi et durer jusqu’à l’éternité.
Mais il s’agit bien du Messie, du Fils de Dieu, qui offrira son corps adorable en temple vraiment et seul digne de la Divinité, ce temple qu’il promit de rétablir le troisième jour après sa destruction (cf. Jn 2:19), ce qu’il exécuta par sa glorieuse résurrection d’entre les morts.
Mais pour être Dieu il n’en est pas moins homme ; et dans cette dernière qualité, quoique impeccable de sa nature, il s’est mis en état de péché, en se chargeant volontairement de toutes nos iniquités (cf. 2 Co 5:21 et Ga 3:13).
A ces considérations, nous allons ajouter quelques mots d’un ancien Rabbin, Isaac Abarbanel (1437-1508), qui relate ceci :
Il y en a qui appliquent cette vision aux jours du Messie qui sera de la postérité de David. Et c’est lui qui bâtira le temple de Dieu, et qui aura cette royauté stable qu’il ne perdra jamais… Et David aussi dit au Seigneur, dans ses actions de grâces : Et tu as fait aussi des promesses à la maison de ton serviteur pour les temps éloignés. Allusion au Messie fils de David.
Nous pourrions en effet rester perplexes en examinant l’héritage historique de David, ces rois qui ne firent qu'ajouter péchés sur péchés, cette terre de Juda sans cesse conquise et reconquise. Mais nous pouvons lire à travers les lignes de la Sainte Ecriture, que la miséricorde de Dieu agit toujours malgré l'infidélité des hommes, et Sa force s'exerce bien au-delà de la faiblesse des créatures. C'est justement là la preuve de l'origine divine de l'Eglise, qui poursuit sa mission spirituelle à travers tous les siècles, malgré l'infidélité permanente, la constante inconstance de chaque être humain.
Les historiens se complaisent à relever les chutes, les écarts, les trahisons des rois, des princes, des grands, de certains membres de l’Eglise aussi, hélas. En cela ils disent des choses vraies, mais s'ils voulaient être de vrais historiens, ils devraient aussi relater les exemples de grande sainteté d'autres rois, d'autres princes, d'autres grands de ce monde, les milliers de prêtres et de missionaires fidèles, de toute époque, de chaque siècle, qui ont allumé partout sur la terre de petites lumières - parfois héroïques - de bonté, d'humilité, de sourire, de fidélité, grâces auxquelles l'amour de Dieu continue de se manifester aux hommes de bonne volonté.
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Avec ses mots poétiques et inspirés, non moins solennels, David chante encore cette promesse dans le psaume 88 qui suit la lecture. David "entrevoit" la réalisation de la promesse de Dieu, il "voit" le Fils de Dieu, le Christ, qui sera un de ses descendants. Dieu l’a juré ! Cette dynastie sera pour toujours (l’expression revient deux fois).
Le roc divin revient aussi, rappelant le roc du désert d’où jaillit l’eau vive, et qui sera finalement l’Eglise, bâtie solidement sur le Christ. C’est de ce roc, de cette pierre stable, que Simon recevra son nom de Pierre.
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Si ce mystère était resté mystérieux pour une partie d’Israël et pour beaucoup de peuples dans le monde, maintenant la naissance du Christ sera l’occasion, nous dit saint Paul, de la révéler à tous les hommes.
On pourra lire toute cette épître aux Chrétiens de Rome, dans laquelle Paul démontre que, désormais, les hommes n’ont plus d’excuses à ne pas croire. Jésus l’avait proclamé : Il n’y a rien de caché qui ne doive être proclamé (Lc 8:17).
Déjà, les rabbins de l’ancienne Synagogue savaient interpréter avec précision les prophéties qui parlaient du Messie. Ceux qui Le reconnurent furent parmi les premiers Chrétiens ; ceux qui Le refusèrent, furent parmi ses accusateurs lors de la Passion ; ils se sont condamnés eux-mêmes par leur obstination.
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Une autre prophétie qui bouleversera aussi les desseins humains, est l'annonce de l'ange Gabriel à Marie. Cette toute jeune fille, à peine sortie de l'adolescence, désirait vivre toute sa vie dans la virginité et s'était consacrée à Dieu. Joseph, son fiancé, désirait aussi vivre dans cette stable et sainte chasteté. Et voilà que Marie va concevoir, elle accepte une mission inouïe, elle portera en elle l'Héritier de David, le Prince de la Paix, le Fils de Dieu Lui-même…
Dans son humilité, elle se trouble, mais Gabriel (dont le nom signifie Force de Dieu) la réconforte et la rassure : c'est l'Esprit de Dieu qui sera à l'œuvre, l'Esprit Saint, Celui qui planait sur les eaux (Gn 1:2) au début de la Création, Celui qui se montrera lors du baptême de Jésus (Lc 3:22), Celui qui se manifestera au jour de la Pentecôte (Ac 2:4).
Le moment de l'Annonciation à Marie et de l'Incarnation du Verbe divin est LE moment historique où commence l'œuvre du Salut de l'homme. Neuf mois avant Noël, nous fêtons en effet cet événement transcendantal, le 25 mars.
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Une très ancienne coutume de l'Eglise fut de saluer l'Incarnation du Verbe Eternel par une prière simple et courte, qui marquait les trois moments importants de la journée, au lever, au repas de midi, au coucher : la prière de l'Angelus, qu'un tableau célèbre a illustré. C'est cette prière que sonne la cloche de l'église en maints endroits encore. Trois petits versets, trois Ave, achevés par une courte prière (celle de ce jour), voilà une dévotion qui serait très facile à instaurer dans nos familles chrétiennes. La voici :
R/ L'Ange du Seigneur porta l'annonce à Marie,
V/ Et elle conçut du Saint Esprit.
Je vous salue, Marie…
R/ Je suis la servante du Seigneur,
V/ Qu'il me soit fait selon ta parole.
Je vous salue, Marie…
R/ Et le Verbe se fit chair,
V/ Et il habita parmi nous.
Je vous salue, Marie…
Prie pour nous, sainte Mère de Dieu,
Pour que nous devenions dignes des promesses de Christ.
Que ta grâce, Seigneur notre Père, se répande en nos cœurs : par le message de l'ange, tu nous as fait connaître l'incarnation de ton Fils bien-aimé, conduis-nous par sa passion et par sa croix jusqu'à la gloire de la résurrection. Par Jésus Christ, notre Seigneur. Amen.